L'entreprise des Méditations est de tout repenser par ordre, et cela exige de s'arracher au déroulement quotidien de la vie qui ne fait qu'ajouter des préjugés à des préjugés.
La vie commence par l'enfance qui est essentiellement l'âge du préjugé, des fausses opinions, de l'ignorance, de l'aveuglement de l'esprit et de l'engendrement de l'erreur. Parce que "nous avons été enfant avant que d'être homme", nous n'avons pas eu l'usage entier de notre raison (...)
[...] Cette proposition : Je suis, j'existe est la première certitude pour l'instant. Le doute n'est pas levé : nous sommes certains de notre existence mais nous ne savons pas encore si il y a un monde extérieur ni même des vérités. Cette certitude n'est vraie rigoureusement que dans notre pensée. Qui suis je, moi qui suis certain que je suis, comment ne pas se méprendre sur cette connaissance ? La connaissance de soi n'est pas introspection. Il est clair que si aucun corps n'existe, je n'ai pas non plus de corps. [...]
[...] Elles sont quelque part et elles doivent avoir un lieu. Elles durent ce qu'elles durent et il y a du temps. Tout cela est vrai même en imagination, demeure même si rien n'existe. Cette région, qui présente un ordre de certitude plus fondamental que le sensible, constitue, avec toutes nos représentations simples et générales, la région des vérités rationnelles, qui demeure après que la certitude sensible s'est effondrée. Elle ne nous apprend rien sur l'existence des choses extérieures, mais elle est plus certaine car elle vaut par elle- même : Que je veille ou que je dorme, deux et trois joints ensemble formeront toujours le nombre de cinq Il faut donc distinguer deux sortes de science : d'un côté la physique, l'astronomie, la médecine portent sur des choses existantes, singulières et composées. [...]
[...] Cette puissance de penser, de douter fait du moi un esprit libre et certain de lui même. Le projet qui anime les Méditations est de trouver quelque chose d'assuré dans les sciences Même l'imagination et la sensation appartiennent à la pensée et demeurent même si nous n'avons pas de corps, même si elles ne correspondent à rien d'extérieur. Le doute supprime la croyance au monde extérieur, l'extériorité, il ne supprime pas l'intériorité, le vécu subjectif qui reste indubitable. L'inquiétant serait que le moi ne puisse pas sortir de lui-même, soit comme enfermé dans ses représentations qui ne vaudraient que pour notre conscience : ainsi nous pourrions avoir une astronomie mais point d'astres, une géométrie mais point d'espace ; tout notre savoir, nos représentations seraient purement subjectifs. [...]
[...] En 1641 paraissent les Méditations métaphysiques, en 1644 les Principes de philosophie et en 1649 le Traité des Passions. Dans sa Préface, Descartes exige deux choses de ses lecteurs : ils doivent détacher leur esprit du commerce des sens et le délivrer entièrement de toutes sortes de préjugés LE PROJET CARTESIEN EST AMBITIEUX: FONDER LE SAVOIR, LA SCIENCE EN FAISANT TABLE RASE DE TOUTES LES CONNAISSANCES ACCUMULEES PAR LES SIECLES ET PAR L'EDUCATION. Nous devons savoir pourquoi le vrai est vrai et à quel titre nous sommes certains de nos certitudes Ce que l'on peut appeler la révolution cartésienne consiste à changer radicalement la représentation du monde. [...]
[...] Une rationalité non critiquée, spontanée ne vaudrait guère mieux que la croyance au sensible. Un rationalisme irréfléchi serait, au fond, un préjugé comme un autre. Le doute cartésien devient métaphysique On se souvient parmi nos anciennes opinions, nous dit Descartes, d'avoir entendu parler d'un Dieu qui peut tout Il pourrait alors faire que notre raison soit folie que je me trompe toutes les fois que je fais l'addition de deux et de trois, ou que je nombre les côtés d'un carré Nombreuses sont à cette époque les interprétations du christianisme qui se servent de la toute puissance de Dieu pour anéantir la raison humaine. [...]
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