Il paraît évident à tous que les Mathématiques sont vraies, on a en effet pu ressentir le sentiment d'évidence qui accompagne les démonstrations mathématiques et contraint l'acceptation de l'esprit. Mais de quelle "vérité" parle-t-on alors ? Une vérité n'est-elle qu'à propos d'une réalité, d'un objet à laquelle elle est adéquate. Lorsque l'on dit « ce que je dis est vrai", la phrase prend sens si le terme "ce" renvoie à quelque chose. Toute proposition vraie requiert son objet et doit en être clairement distinct, sinon il semble que l'on tombe dans le non sens.
Mais alors que penser à propos des vérités mathématiques ? Toutes vérités mathématiques supposent que l'on soit à même de désigner un objet dont cette science serait l'étude et que l'on dispose d'une procédure permettant de vérifier l'adéquation de ce qui est dit à l'objet.
Nous voyons qu'un problème se pose dès lors que l'on veut penser le statut de la vérité mathématique (...)
[...] Qu'est-ce que la déduction ? Elle est associée à deux idées : la certitude et l'indépendance par rapport au sensible. La déduction est d'abord, rappelons-le, l'opération par laquelle on conclut rigoureusement d'une ou plusieurs propositions prises pour prémisses, à une proposition qui en est la conséquence nécessaire, en vertu de règles logiques Le soutien de l'expérience n'est pas requis, il est même rejeté. L'expérience sensible ne nous permet pas de parvenir à la nécessité et à l'universalité du raisonnement déductif ; elle nous apprend qu'une chose est ou a été non pas qu'elle doit être. [...]
[...] Au 18ème Saccheri tenta de démontrer par l'absurde la fameuse proposition euclidienne. S'il était possible de déduire cette proposition des autres postulats et des définitions d'Euclide, on ne manquerait pas en effet, en partant d'une proposition en contradiction avec le postulat de départ d'aboutir à quelque théorème qui serait en contradiction avec les autres principes de départ de la géométrie euclidienne. Le postulat se trouverait ainsi démontré par l'absurde. Au 19ème siècle deux savants, un russe Lobatchevski et un hongrois Bolyai poussèrent leurs recherches dans cette direction. [...]
[...] Nous avons pu voir que cette compréhension du modèle s'était déplacée avec la crise des mathématiques au 20ème siècle et l'apparition des géométries non euclidiennes. Désormais les axiomes de départ ne sont plus conçus comme évidents. Les seules conditions auxquelles doivent se soumettre les affirmations de départ sont celles de cohérence interne (les axiomes ne doivent pas se contredire), d'indépendance (un axiome ne doit pas être déduit des autres), de suffisance ou de complétude(le système doit permettre de déduire l'essentiel des théorèmes connus). C'est donc désormais la fécondité des axiomes qui est l'essentiel, plutôt que leur évidence »intrinsèque. [...]
[...] Avec l'axiomatique on assiste au déclin des absolus mathématiques Les axiomes n'étant plus considérés comme des évidences mais comme de simples conventions opératoires contingentes, les propositions qu'on en déduit perdent à leur tour le caractère de vérités absolues. Exemple : la somme des angles est-elle égale à deux droits ? Oui, si j'adopte l'axiome (ou le postulat) euclidien des parallèles, non si j'adopte des axiomes non euclidiens. Comme le précise Blanché : Il n'y a plus pour les théorèmes de vérité séparée et pour ainsi dire atomique : leur vérité, c'est seulement leur intégration au système et c'est pourquoi des théorèmes incompatibles entre eux peuvent être également vrais pourvu qu'on les rapporte à des systèmes différents. [...]
[...] Par exemple Euclide définit la ligne droite celle qui repose également sur ses points Cette définition renvoie à l'opération du marbrier qui pour être sûr qu'une surface de marbre est plane promène une règle enduite de craie colorée sur cette surface. Et il faut que la trace laissée soit continue. Mais au fur et à mesure des progrès des mathématiques on parvient à des définitions plus abstraites qui sont de purs schèmes opératoires justifiés par leur fécondité. Toute définition est celle d'une opération possible. Nous apercevons le primat de l'opération mathématique sur l'être mathématique. Les postulats Ce sont des propositions indémontrables que le mathématicien demande (postulare) à son auditeur d'accorder. [...]
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