Asebes dans l'Antiquité grecque, athée en Occident, kafir dans la sphère musulmane, wù shén lùn en Chine, les termes varient d'un continent à l'autre, d'une civilisation à l'autre, d'une époque à l'autre mais constituent, en contrepoint des religions, l'un des grands modes de penser de l'humanité. Fondé sur cette conviction que le monde peut se passer du recours à une ou plusieurs divinités pour fonctionner et se perpétuer, il va aujourd'hui jusqu'à affirmer que dieu et les croyances sont une erreur cognitive, un mode de perception de la réalité propre à l'homme.
Pourtant, l'athéisme reste le parent pauvre de la recherche historique surtout en comparaison de celle, infiniment plus prolixe, qui aménage le territoire des religions. Si les philosophes et les théologiens se sont abondamment penchés sur le sujet, la bibliographie historique accessible au grand public brille d'un vide abyssal et visiblement persistant qui ne permet qu'une vision très large et lacunaire de ce pan de l'Histoire. Tentons ici de lui rendre justice en nous en tenant à l'Occident (...)
[...] Tout au plus trouve-t-on dans le Prosologion de Saint Anselme (1033 1109) la dénonciation de l'insensé qui dit en son cœur [que] Dieu n'existe pas Mais ce dieu là reste celui de l'autre Aucune mention n'est faite de l'athée ou de l'athéisme dans le Dictionnaire de l'ancienne langue française du IXème au XVème siècle de F. Godefroy. Et pour cause, le retour du terme s'effectue au tout début du XVIème siècle dans les glossaires en grec et en latin comme celui de Calepinus en 1502 : Atheos et atheus, qui n'a ni dieu ni religion puis en français dans la préface à la traduction du De anima d'Aristote par Gentien Hervet en 1544. Pourquoi au XVIème siècle ? [...]
[...] Au Ier siècle, Plutarque précise dans les Vies que vers 432 avant J.C. un certain Diopeithès proposa un décret en vertu duquel seraient poursuivis par voie d'eisangélie3 ceux qui ne reconnaissent pas les choses divines ou qui enseignaient des doctrines sur les choses célestes S'en suit une série de procès pour impiété qui confinent à l'accusation politique et civique. Théodore l'Athée : On ne sait que peu de choses sur Théodore de Cyrène dit l'Athée, puis le divin mais pour ce qui nous intéresse, il est disciple de Diagoras de Milet, lui-même qualifié d'athée pour avoir affirmé que les dieux ne s'occupaient pas des affaires humaines. [...]
[...] Lucrèce relaye les mêmes idées et affirme qu'ils ne sont que des illusions permettant de combattre la mort, que le clinamen (mouvement spontané par lequel les atomes dévient de la ligne de chute causée par le baros, la pesanteur) fonde la liberté humaine. L'ataraxie, la quiétude de l'âme, est à ce prix. Rome n'échappe pas au phénomène et Dion Cassius dans son Histoire romaine met en garde contre l'atheotes (LII, 36) qui s'inscrit dans une réalité plus large, celle de la superstitio, laquelle définit la nébuleuse des comportements religieux incorrects tout autant qu'une attitude trop respectueuse envers les dieux. [...]
[...] ATHEISME, l'histoire d'un mot. Asebes dans l'Antiquité grecque, athée en Occident, kafir dans la sphère musulmane, wù shén lùn1 en Chine, les termes varient d'un continent à l'autre, d'une civilisation à l'autre, d'une époque à l'autre mais constituent, en contrepoint des religions, l'un des grands modes de penser de l'humanité. Fondé sur cette conviction que le monde peut se passer du recours à une ou plusieurs divinités pour fonctionner et se perpétuer, il va aujourd'hui jusqu'à affirmer que dieu et les croyances sont une erreur cognitive, un mode de perception de la réalité propre à l'homme. [...]
[...] Que conclure de cette définition ? Que Pierre Larousse est un homme de son temps, à savoir un XIXème siècle encore très croyant. Songeons qu'en 1825, au début du règne de Charles est votée une loi punissant de mort le sacrilège et du supplice des parricides la profanation des hosties. Le reste du siècle va naviguer sur des eaux où les scientifiques (Lamarck démontrant l'adaptation des espèces à leur environnement et Darwin la sélection naturelle) saperont comme jamais les fondements de la religion. [...]
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