Dans l'Antiquité grecque, avec l'expérience de la démocratie athénienne, l'homme libre, envisagé par Aristote dans La Politique comme un «animal politique», recouvre le statut de citoyen opposé à l'esclave. Acteur de la vie de la cité polis, il s'inscrit au cœur de la communauté.
Néanmoins, l'approche originelle de la liberté, comme absence de contraintes étrangères, incite l'homme à se retirer dans la solitude. Mais la pensée moderne et contemporaine, en formulant un déterminisme complexe et multiforme, a présenté l'homme irrémédiablement conditionné par son environnement. Ainsi cette opposition frontale traduit la contradiction de l'intersection de ces deux notions en présentant une corrélation paradoxale. L'homme seul uniquement peut être libre; pourtant, le sentiment d'isolement est une illusion car nous sommes inséparables de notre entourage, par l'interaction avec le monde ou les relations antagonistes avec autrui.
Cet obstacle incontournable appréhende les enjeux de notre parcours: l'expérience de la liberté, la rencontre avec l'altérité, le choix d'un mode de vie… Notre parcours essayera donc de résoudre un problème imposé à nous: prend-on davantage conscience de soi seul livré à soi-même ou bien au contact des autres? Un homme libre est-il un homme seul? Nous nous demanderons donc si la liberté est l'individualisme...
[...] Dans la Critique de la raison pure, Kant remarque l'«antinomie de la raison pure!» par une différenciation: le monde phénoménal est totalement gouverné par la nécessité d'où l'existence des sciences reposant sur le déterminisme alors qu'au niveau du monde nouménal, il existe pour l'homme la liberté réelle pratique, c'est-à-dire «l'indépendance de la volonté à l'égard de toute loi autre que la loi morale» (Critique de la raison pratique). Pour sortir de la minorité, l'homme doit s'orienter dans la pensée par la pure raison a priori en osant penser par soi-même («Sapere aude» Horace), en prenant le parti de l'intelligence et du courage de savoir, en agissant après réflexion. Ainsi, cet être responsable atteint la Majorité accède aux lumières (Aufklärung) et se rapproche de l'Orient. [...]
[...] Dans l'état social, l'approche de la sociologie établit que les comportements humains sont influencés par le milieu social et familial. L'homme, conçu comme produit social par Marx, est marqué par l'infrastructure perceptible dans la linguistique -je crois que je parle alors que la langue parle-: «Quand notre conscience parle, c'est la société qui parle» (Durkheim). L'être est contaminé par la contagion d'autrui, véritable caisse de résonance; l'intersubjectivité des valeurs sociales et du dogmatisme religieux élabore le «prêt à penser» de la masse remettant même en cause la liberté de penser, ce que Valéry prononcera sous forme de paradoxe homme vraiment libre ne tient guère à ses opinions». [...]
[...] La liberté n'est pas le silence de la loi: elle ne commence pas où la loi cesse de commander ou d'interdire. Au contraire, la liberté politique est à la fois l'exécution des devoirs sociaux, notamment l'obéissance volontaire et le respect de la loi même injuste (Criton), mais également le rôle actif (pouvoir de légiférer et de décider); ce que Montesquieu explicite dans De l'esprit des lois «Dans un Etat, c'est à dire une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu'à pouvoir faire e ce que l'on doit vouloir, et à n'être pas contraint de faire ce qu'on ne doit pas vouloir». [...]
[...] Le pouvoir d'obéir à la volonté raisonnable et le choix moral postulent la vraie liberté se fondant sur «l'impératif catégorique». Une morale provisoire se manifeste par «l'idéal régulateur» (harmonie intérieure et paix extérieure) de l'autorégulation: toute substance en soi maîtresse de soi qui n'obéit qu'à sa propre loi se défait de l'arbitraire et par la volonté libre, atteint la sagesse. «Penser en se mettant à la place de n'importe qui d'autre» signifie respecter autrui, mon semblable par sa raison, l'altérité d'autrui apparaissant inessentielle. [...]
[...] Dans la Phénoménologie de la perception, Merleau-Ponty aborde la conception intermédiaire d'Husserl: le choix de notre monde confère un «champ de liberté», mais le monde nous choisit et précise une «liberté conditionnée». La libération vis-à-vis de moi-même, par la psychanalyse, répond à l'impératif socratique: «Connais-toi toi-même!» est essentielle à la conquête de la liberté de l'être pour qu'«aucune partie de lui-même ne fasse rien qui ne lui soit étranger». En effet, l'aliénation primaire du moi trouve autant de différences de nous à nous-mêmes que de nous à autrui» (Montaigne, Essais) pousse un traitement thérapeutique libérateur de l'aliénation en vue d'acquérir une véritable liberté: vraie liberté, c'est pouvoir toute chose sur soi». [...]
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