Le chapitre que nous nous proposons ici d'étudier est le chapitre VI, des Théories de la justice de Kymlicka, « Le féminisme ». Alors qu'il existe plusieurs courants féministes, il s'agit ici d'un examen de trois critiques féministes et de la façon dont les théories politiques traditionnelles répondent aux femmes. Selon celles-ci, tous les membres de la société devraient être traités comme des égaux. Mais depuis peu, elles ont accepté l'inégalité des sexes. Ces trois critiques ou arguments sont les suivants: tout d'abord, on verra la conception sexuellement neutre de l'inégalité des sexes, puis la distinction entre le public et le privé - ces deux arguments s'appuyant sur l'idée selon laquelle la justice est partiale et sexiste. Enfin, on verra en quoi c'est l'insistance sur la justice qui reflète cette partialité. Ce sont là les trois points de contact les plus denses entre féminisme et philosophie politique traditionnelle [...]
[...] Le problème est maintenant de savoir de quel ordre sont ces principes, de l'ordre du droit et de l'équité ou de l'ordre de la responsabilité et des relation Il s'agit ici de concepts moraux divisibles en trois catégories comme l'expose Kymlicka: le principe d'universalité contre le souci des relations particulières le respect de notre commune humanité contre le respect des différences individuelles et la revendication de nos droits contre l'acceptation de nos responsabilités Sur la première catégorie, on différencie la justice de la sollicitude en disant que la première tend vers l'impartialité et que la seconde tend à maintenir le tissu relationnel Avec l'éthique de la sollicitude, les individus passent au premier plan et ce qui fonde la morale, c'est le sentiment qu'on éprouve envers autrui au-delà de tout principe de justice. Dans ce cas, le risque est d'exclure certaines personnes de ce sentiment. En effet, on ne se focalise que sur les liens qu'on entretient avec les autres c'est-à-dire qu'on n'envisage que nos proches. Avec l'universalisme, on évité ce risque. [...]
[...] Mais il est bien plus facile d'accorder des privilèges à une partie de la population que d'en contraindre une autre, c'est-à-dire qu'il est bien moins risqué, pour la paix civile, de donner des droits à une certaine catégorie de personnes que d'en astreindre une autre à certaines tâches. On a vu les distinctions entre sphère publique et sphère privé en matière d'égalité, intéressons nous à présent plus précisément à la sphère privée elle-même. Comment définir la sphère privée? On peut dire qu'elle se distingue de la vie sociale en ce sens qu'elle ne concerne qu'un groupe d'individus eux-mêmes liés entre eux, comme la famille. On invoque souvent le droit à la vie privée Mais qu'est-ce que cela signifie? [...]
[...] De là, deux conceptions de la moralité découlent. La première concerne les femmes et est une moralité fondée sur la sollicitude qui organise le développement moral autour de la compréhension des relations et de la responsabilité La seconde concerne les hommes et est une morale comme équité qui organise [le développement moral] autour de la compréhension des droits et de règles D'où une éthique de la sollicitude et une éthique de la justice C'est à Gillian et Tronto que nous allons nous référer pour tenter d'éclaircir cette notion d'éthique de la sollicitude. [...]
[...] On va à présent s'intéresser aux distinctions qu‘on peut faire, en matière de justice, dans le public et le privé. La justice concerne le public et repose sur des conventions tandis que les relations intrafamiliales sont de l'ordre du privé et repose sur l'instinct naturel ou la sympathie. Comme on l'a vu précédemment, selon la tradition ce sont les hommes qui exercent les rôles du domaine public et les femmes ne peuvent en aucun cas intervenir. Les théories contemporaines quant à elles récusent cette idée. [...]
[...] Cela engendre des injustices pour les femmes. Les positions sociales les plus valorisée (c'est-à-dire les mieux rémunérées et les mieux appréciées) sont attribuées aux hommes tandis que les emplis les moins valorisés (c'est-à-dire les moins bien rémunérés et le moins appréciés) reviennent aux femmes. De là, une autre inégalité émerge: les femmes deviennent économiquement dépendantes des hommes car ceux-ci apportent l'essentiel du revenu du ménage. Le véritable problème n'est pas de décider s'il faut tenir compte de l'identité sexuelle mais de savoir si on n'en a pas déjà tenu compte. [...]
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