Une tradition philosophique condamne le désir dans la mesure où il semble nous condamner à une insatisfaction permanente : n'a-t-on pas constaté que, à peine comblé, il se déplace sur un nouvel objet ? Si un individu, dans son existence, était capable de désirer tour à tour chacun des êtres et objets qui composent la réalité, il ne pourrait, en fin de parcours, que juger cette réalité décidément insatisfaisante, puisque son dernier désir témoignerait qu'il lui manque encore quelque chose. Une telle hypothèse se contente cependant de souligner, dans le désir, la vigueur d'un manque ou d'une absence : dans cette optique, on voit mal comment il pourrait se satisfaire du donné, et donc de la réalité. Pourtant, si on insiste sur la productivité même du désir, sur la manière dont il peut modifier au moins certaines dimensions de cette réalité, peut-être devient-elle plus satisfaisante. Reste à savoir si une telle satisfaction est définitive, ou si l'efficacité même du désir n'indique pas qu'elle ne peut être que temporaire (...)
[...] Conclusion Affirmer que le désir ne peut jamais se satisfaire de la réalité ne revient pas à considérer que le désir est malheureusement insatiable. C'est au contraire en rappelant que la réalité n'est pas figée, que l'homme y agit en permanence et qu'il n'en finit pas de la transformer, que l'on peut redonner au désir son plein dynamisme. En abandonnant un point de vue moral sur ce qui est parfois présenté comme son nécessaire échec, on peut être amené à penser que cet échec est précisément ce qui constitue sa chance de relance et son étrange efficacité - qu'il ne s'agit pas de mesurer en termes de performance habituelle, mais en l'estimant comme le fondement de ce qui fait agir les hommes. [...]
[...] De la réalité présente à la réalité future On peut donc admettre que le désir ne peut jamais se satisfaire de la réalité. Lorsque Platon encourage à se déprendre du monde des apparences pour ne s'intéresser qu'à l'univers des Idées, il ne nie pas radicalement le désir: il le réoriente vers ce qui, pour lui, constitue la seule réalité intéressante. Mais pour accéder aux Idées, encore faut-il bien en avoir le désir (qui est alors désir de vérité), et l'allégorie de la caverne enseigne que les obstacles sont nombreux, et que long est le temps de la dialectique ascendante. [...]
[...] On admet volontiers que le désir vise moins son objet réel que les qualités qu'il lui attribue, même si elles lui font défaut. De ce point de vue, il ignore ce qu'est la réalité, et lui adjoint volontiers des caractères positifs correspondant aux tendances du sujet désirant. Dans de telles conditions, il n'est guère étonnant que l'amour ait la réputation d'être aveugle c'est qu'il s'attache moins à la réalité d'un être particulier qu'aux qualités qu'il lui apporte. Il est moins concerné par ce que pourra lui donner réellement l'être aimé que par ce qu'il en espère, ou par l'image qu'il s'en construit d'où son éventuelle déception. [...]
[...] Une telle hypothèse se contente cependant de souligner, dans le désir, la vigueur d'un manque ou d'une absence : dans cette optique, on voit mal comment il pourrait se satisfaire du donné, et donc de la réalité. Pourtant, si on insiste sur la productivité même du désir, sur la manière dont il peut modifier au moins certaines dimensions de cette réalité, peut-être devient-elle plus satisfaisante. Reste à savoir si une telle satisfaction est définitive, ou si l'efficacité même du désir n'indique pas qu'elle ne peut être que temporaire. Quelle satisfaction espérer de la réalité ? Le désir ne révèle-t-il pas ce qui fait défaut ? [...]
[...] La question est donc de savoir si une réalité, même transformée par le désir, est capable de le combler définitivement. Introduction La réalité ne peut être telle quelle satisfaisante II) Mais elle peut être transformée par le désir III) Toutefois, le désir est par sa nature indéfiniment relancé Conclusion - UTILISER SES CONNAISSANCES La maîtrise des désirs (par exemple chez les épicuriens) opère une distinction entre ceux qui concernent le sujet lui-même et ceux qui s'adressent à la réalité extérieure : les premiers peuvent être comblés, les seconds sont insatiables. [...]
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