Même si aujourd'hui le matérialisme semble envahir la scène occidentale, de la consommation effrénée à la philosophie à la Michel Onfray, même s'il orchestre une valse dans laquelle la matière parait à l'honneur, en réalité, comme le notait François Dagognet, la matière a souvent été rabaissée ou mise au carrefour de contradictions, notamment quand il s'est agi de sa forme vivante. Du latin materia, qui dérive elle-même de mater, la mère, la source, la matière semble être la matrice originelle dont tout est issu, la texture sensible qui compose les choses réelles, la terre, l'eau, le ciel, les êtres vivants. Mais du même coup, ce principe « maternel» a souvent été perçu comme inférieur à l'esprit ou l'âme, censé se situer au-dessus de la mortalité et de l'animalité primales du corps. Héritier d'un spiritualisme longtemps dominant depuis Platon et surtout le succès du Christianisme, l'Occident a du mal à s'abstraire d'un dualisme classique entre la matière et l'esprit (...)
[...] Penser n'est pas qu'une opération abstraite qui éloigne l'esprit de la matière, l'âme du corps. Comme en art, la pensée est une pensée des choses, un dialogue avec la nature et la société, quelque chose de céleste et de terrestre tout à la fois. Autant dire que la matière n'est pas plus une réalité terre-à-terre que l'âme: dans notre rapport à elle, de la nourriture au cinéma en passant par la sexualité, nous ne pouvons faire l'économie d'un questionnement sur la valeur de notre pensée du corps . [...]
[...] En effet, si la matière (par exemple neuronale) possède son propre moteur» de fonctionnement, la nécessité d'une âme animatrice de la vie paraît obsolète. Mais le vivant est-il la vie? Par-delà son autonomie organique, le vivant n'est-il pas aussi en prise avec la question de la personne par delà l'organisme? Une personne n'est pas qu'un système de fonctionnalités matérielles, elle est aussi une existence dont l'unicité, le mystère ou l'angoisse forment une histoire qui a son âme c'est-à-dire ici son sens propre. [...]
[...] La matière vivante a-t-elle une âme? Même si aujourd'hui le matérialisme semble envahir la scène occidentale, de la consommation effrénée à la philosophie à la Michel Onfray, même s'il orchestre une valse dans laquelle la matière parait à l'honneur, en réalité, comme le notait François Dagognet, la matière a souvent été rabaissée ou mise au carrefour de contradictions, notamment quand il s'est agi de sa forme vivante. Du latin materia, qui dérive elle- même de mater, la mère, la source, la matière semble être la matrice originelle dont tout est issu, la texture sensible qui compose les choses réelles, la terre, l'eau, le ciel, les êtres vivants. [...]
[...] Cela admis, il est manifeste que toutes les alternatives proposables entretiennent malgré tout une séparation tenace entre la matière vivante et l'âme, avec une prédominance de l'une sur l'autre. Mais là n'est pas encore l'essentiel. Le cœur du problème réside plutôt dans le fait que l'on a du mal à penser à l'âme autrement que d'une façon spiritualiste, alors même que ce questionnement implique de réfléchir sur les conjonctions entre matière, vie et pensée: en clair, la matière ne doit pas être enfermée dans l'idée d'une passivité stupide. Par sa complexité et sa richesse, elle s'organise et se diversifie de façon fascinante. [...]
[...] C'est pourquoi il était nécessaire de proposer une réflexion qui tente de sortir de ces ornières fatigantes. Dans un premier temps, on pouvait démonter et démontrer l'étendue des faux problèmes provoquée par cette notion d'âme prisonnière des théories classiques: tant que l'âme reste enclose dans une perspective réductrice, il devient impossible - sauf à être matérialiste ou spiritualiste - d'en comprendre l'importance pour penser à la fois la question de la vie (au-delà de sa matérialité biologique) et de la pensée (au-delà de l'étude des mécanismes neurologiques). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture