Comme Rousseau le racontera lui-même dans Les Confessions, sa première oeuvre philosophique d'importance, le Discours sur les sciences et les arts (1750) a été rédigée afin de répondre au concours lancé la même année par l'Académie de Dijon sur la question : le rétablissement des Sciences et des Arts a contribué à corrompre ou à épurer les moeurs ? Rousseau (qui devait remporter le prix) prend le contre-pied des philosophes éclairés comme Voltaire en estimant que la civilisation s'oppose à la vertu primitive de l'homme (...)
[...] La civilisation a donc fondé les assises de sa grandeur sur sa répulsion à l'égard des nomades et des bêtes, tous deux censés incarner l'indiscipline foncière d'une nature opaque et rivée à ses besoins physiologiques. Le progrès est donc passé par l'idée d'une conquête de la matière corporelle par l'âme, d'une hiérarchie des fonctions de langage et de pensée sur les fonctions primaires de désirs irraisonnés donc néfastes. Or, cette évolution, pour nécessaire qu'elle fût, cache aussi son lot d'hypocrisie morale, puisque bien des tares que nous attribuons à ce qui reste d'animal en nous (le goût du sang par exemple) sont souvent les produits d'une idéologie ou d'un contexte social déplorable. [...]
[...] Sur ce point, c'est encore Rousseau gui a le mieux analysé l'ambivalence foncière du progrès occidental. En second lieu, le progrès a été d'emblée traversé par un autre sentiment de prétendue supériorité, celle à l'égard des autres espèces animales. Dès l'Antiquité (qu'on songe à Aristote : Politique Livre I la nature humaine, parce qu'elle est dite sociable en un sens supérieur à la sociabilité animale, se pose en progrès continu sur la voie d'une hominisation toujours plus à même de nous débarrasser de la bête» qui sommeille en nous. [...]
[...] Dissertation : La culture est-elle une source de progrès par rapport à la nature? Comme Rousseau le racontera lui-même dans Les Confessions sa première œuvre philosophique d'importance, le Discours sur les sciences et les arts (1750) a été rédigée afin de répondre au concours lancé la même année par l'Académie de Dijon sur la question : le rétablissement des Sciences et des Arts a contribué à corrompre ou à épurer les mœurs? Rousseau (qui devait remporter le prix) prend le contre-pied des philosophes éclairés comme Voltaire en estimant que la civilisation s'oppose à la vertu primitive de l'homme. [...]
[...] Enfin, au nom de théories scientifiques présentant la nature comme un univers sans finalité et parcourue par une concurrence vitale redoutable, la civilisation s'est crue en progrès par rapport à un univers aussi absurdement chaotique. Or .si chez Darwin le hasard semble la donnée centrale de la nature, nous aurions tort de le prendre à la lettre en croyant que seule la culture peut y remédier. La nature, via la sélection naturelle, possède déjà un principe régulateur d'organisation et de perfectibilité que les sociétés ne font qu'imiter, en rien dépasser. [...]
[...] En ce sens, le préjugé habituel de l'homme de progrès, s'est nourri du présupposé selon lequel la nature est par essence un monde vierge et hostile que la civilisation défriche et dompte pour le mieux-être des hommes. Or rien ne nous garantit vraiment qu'un progrès soit un mieux: ainsi, l'avancée technologique en matière d'armement peut être tenue pour un progrès - une amélioration des performances dans la science» destructrice, toujours plus sophistiquée - ce qui n'implique pas que ce soit positif en termes de bienfaits. En clair, selon la manière d'appréhender cette notion de progrès, l'éclairage du sujet peut considérablement varier. Nous y reviendrons. [...]
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