La justice sociale est-elle un mirage ?

Résumé du document

“Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.”
Au 17 ème siècle, dans sa fable Les animaux malades de la peste, La Fontaine critiquait l'hypocrisie de la justice contrôlée par les puissants, pour les puissants. Quatre siècles plus tard, nous célébrons la journée de la justice sociale, le 20 février car « la justice sociale est une condition fondamentale de la coexistence pacifique et prospère des hommes au sein des nations et entre les nations elles-mêmes. » selon Ben Ki Moon.
Dans les deux cas, nous sommes loin de la Justice représentée les yeux bandés qui défend l'idée qu'être juste, c'est refuser les traitements de faveur, ne pas faire acceptation des personnes.
La justice institutionnelle telle qu'elle est établie dans nos sociétés démocratiques a pour souci de dire le droit, de faire respecter la loi objective de l'État contre l'appréciation subjective que chacun de nous en a.

Extraits

[...] Ainsi, parce qu'elle crée une éthique, et devient un outil au service du gouvernement, la justice sociale apparaît comme une solution à un éventuel délitement de la société face à un déni de reconnaissance des minorités. En effet, les lois, les normes culturelles et sociales d'une société peuvent aller à l'encontre d'une manière de vivre et de penser de certains individus. Le risque est alors de marginaliser les minorités qui finissent par intérioriser de façon négative les différences. Les États-Unis sont un bon exemple. [...]

[...] Mais que peut faire la justice lorsque ce mal s'appelle chômage ? Ni notre système judiciaire fondé sur la légalité ni le juge ne peuvent améliorer la situation des 3 millions de chômeurs en France. La nuit du 4 août 1789 qui a aboli les privilèges a également consacré les Droits de l'Homme et le principe d'égalité de tous devant la loi. Mais cette égalité devant la loi ne tend pas inévitablement vers l'égalité des conditions, et la justice en tant qu'institution a déçu, car la société la plus juste n'est pas la plus efficace (John Rawls, Théorie de la Justice). [...]

[...] Ainsi nous verrons dans une première partie que le concept de justice sociale correspond davantage à un phénomène de judiciarisation des sociétés modernes qu'à une continuité de l'idée de justice distributive Enfin nous verrons dans un second temps que la justice sociale peut être perçue comme un outil du vivre ensemble, une utopie nécessaire pour gouverner qui toutefois, poussée à l'extrême peut être dangereuse Afin d'appréhender le concept de justice sociale, il est nécessaire de distinguer la justice comme institution de la Justice comme principe. Du latin jus qui signifie le droit, la justice a trois sens distincts, un sens institutionnel, un sens légal et un sens moral. La justice en tant qu'institution se réalise dans les lois. Elle repose sur le droit, promeut l'égalité de tous les citoyens devant la loi, et le respect des lois positives de l'État. A contrario, la justice sociale privilégie l'égalité des conditions entre les individus. [...]

[...] Elle corrige la démesure d'une justice trop générale et donc injuste. Cependant l'équité ne doit pas être détachée de la légalité, car pour être juste le juge doit être équitable tout en préservant l'égalité qui est le fondement de la justice. On retrouve cette idée en matière pénale avec la proportionnalité de la peine à la faute, la prise en compte de la personnalité de l'accusé, ou encore la notion de circonstance atténuante. Chez Aristote, l'équité est importante, mais elle n'occupe pas une place centrale. [...]

[...] La justice comme équité est un idéal mondial. Cependant de nombreux penseurs, comme les libertariens (dont les thèses vont être popularisées par Nozick lorsqu'il va réfuter la thèse de John Rawls) et les néolibéraux critiquent cette thèse en avançant que la justice sociale porte atteinte au principe fondamental de l'humanité qui est la liberté. Selon les libéraux tout individu dispose à sa naissance de droits naturels qu'il est immoral et injuste de violer, il s'agit de la liberté individuelle et du droit de propriété. [...]