L'institution judiciaire est toute puissante. Elle peut parfois agir en contradiction avec l'idéal de justice.Par justice, il faut comprendre à la fois la norme du droit et ce qui est en conformité avec cette norme (acception juridique), mais aussi l'adéquation entre le mérite et sa rétribution (acception morale). Le libellé du sujet indique donc qu'il existe un lien de dépendance entre l'institution judiciaire et la justice comme vertu.
Ici, cette nécessité de disposer d'une institution pour servir l'idéal de justice est considérée comme acquis. A la lumière des enjeux plus modernes de justice sociale, ce lien de dépendance est-il aussi systématique ?
En d'autres termes, le sujet nous invite à voir en quoi la justice peut-elle être rendue sans pouvoir institué.
[...] C'est l'état de nature hobbesien. La guerre de chacun contre chacun. La véritable nature de l'homme serait révélée lors d'une telle fiction politique, et résumée par la célèbre maxime homo homini lupus La solution proposée par Hobbes pour substituer une violence légitime à la violence, la justice à la vengeance, est un pacte réciproque entre toutes les parties instituant une autorité détentrice de cette violence légitime, une institution garante de la justice, le Léviathan. Ce pacte, ou contrat social sera repris par Rousseau. [...]
[...] Ainsi, l'Etat répond donc aux aspirations de justice civile et pénale, mais aussi de justice sociale. Il est l'instigateur des politiques de redistribution. Rawls justifie l'interventionnisme étatique grâce au principe de différence. Il devient nécessaire d'organiser la redistribution des biens, et des institutions apparaissent comme essentielles à ce dessein. L'impôt est l'outil le plus représentatif des politiques de redistribution et de recherche d'équité. Il apparaît parfois injuste sous certaines formes, tout comme l'appareil judiciaire est sujet à des erreurs. La TVA par exemple taxe indifféremment les plus aisées et les plus défavorisées. [...]
[...] Tout comme l'institution est défaillante, l'homme peut aussi tromper sa nature. D'autre part, si l'on considère les questions de justice sociale, c'est-à-dire les questions de justes répartitions des mérites et des biens pour une société donnée, les institutions, qui intuitivement paraissent nécessaires, ne le sont pas forcément pour garantir une société juste. C'est toute la thèse des libertariens, Robert Nozick en tête. Une société juste ne peut selon lui résulter que d'un Etat minimal. L'interventionnisme rawlsien est tout aussi condamnable pour un libertarien, que l'est l'interventionnisme keynésien pour un libéral. [...]
[...] Ils apparaissent, comme dans le cas des institutions judiciaires, comme un mal nécessaire. Pour conclure, une société où la justice se ferait au dehors du carcan d'institutions parfois défaillantes est impossible du fait de la profonde nature de l'homme, et de l'impossible justice sociale découlant des principes libertariens. Au contraire, l'homme a besoin d'institutions pour assurer la justice et éviter la guerre de chacun contre chacun, éviter que la vengeance soit érigée comme principe de justice de base ; mais aussi, ces institutions sont là pour assurer que la société soit juste, que ses membres ne souffrent pas des inégalités jugées injustes au regard du principe de différence. [...]
[...] En d'autres termes, le sujet nous invite à voir en quoi la justice peut- elle être rendue sans pouvoir institué ? Nous verrons dans un premier temps que la justice sans institutions a du mal à faire d'une société une société juste ; puis nous analyserons la nécessité de disposer d'institutions pour faire triompher cet idéal afin de dépasser le stade de l'intuition suggérée par le libellé du sujet, à la fois en termes de justice commutative et corrective, mais aussi de justice distributive pour reprendre la typologie aristotélicienne. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture