Pour vivre, et même pour bien vivre, il n'est pas besoin d'interrogations métaphysiques, de cette sorte d'inquiétude de l'esprit qui se pose des problèmes aussi éloignés de la vie quotidienne que ceux de l'Etre (pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas plutôt rien ?), de la Vérité (que puis-je connaître ?) ou de l'essence du Moi (qui suis-je ?).
[...] Les connaissances, il est vrai, s'accumulent, mais pour peu qu'on se livre à un examen critique, plus rien n'est certain. Par le déploiement du doute, je suis conduit à m'interroger, a penser à moi, a mes fins, à mon bonheur : je prends conscience de moi-même dans ma situation d'être-aumonde. Je sais que je peux contribuer à changer une situation. Mais il en est certaines que je ne peux modifier : il me faut mourir, travailler, vivre avec autrui. Ces situations-limites me révèlent ma finitude et ma précarité. [...]
[...] C'est pourquoi, d'autre part, on ne peut séparer ce qui serait une philosophie théorique d'une philosophie pratique : la philosophie ne comporte pas deux parties dont l'une est la mise en œuvre de l'autre. La philosophie ne sert pas la vie parce qu'elle est elle-même une manière de vivre, un art de vivre. Transition : On ne peut légitimement renoncer à l'interrogation métaphysique. Dans quelle mesure est-elle également nécessaire ? III.Thèse à' défendre : nécessité de l'interrogation métaphysique L'homme est un animal métaphysique. L'origine de l'interrogation métaphysique, c'est l'étonnement (cf. PLATON, Théétète). [...]
[...] On peut objecter à la critique nietzschéenne que la philosophie et ses interrogations métaphysiques n'ont pas pour fin la vie elle-même quand bien même elles tâchent de définir ce qu'elle doit être. Cela veut dire deux choses. D'une part, que la philosophie n'a pas pour vocation d'être la servante de la vie. Une telle conception est celle du sophiste (par exemple, CALLICLES) pour lequel l'interrogation métaphysique doit immédiatement, pour prouver sa légitimité et sa validité, montrer à quoi elle est bonne. [...]
[...] Peut-on renoncer à toute interrogation métaphysique ? I. Thèse à réfuter (la thèse ici développée est aussi bien celle du sens commun que de certains philosophes qui contestent à l'interrogation métaphysique un caractère de nécessité.) L'interrogation métaphysique est inutile. Pour vivre, et même pour bien vivre, il n'est pas besoin d'interrogations métaphysiques, de cette sorte d'inquiétude de l'esprit qui se pose des problèmes aussi éloignés de la vie quotidienne que ceux de l'Etre (pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas plutôt rien de la Vérité (que puis- je connaître ou de l'essence du Moi (qui suis-je Celui qui ne s'interroge pas de cette manière peut être heureux car le bonheur n'est pas affaire de connaissance ni fonction des lumières acquises. [...]
[...] Certes, on peut vivre bien sans interrogation métaphysique, mais on ne peut vivre mieux. Vivre mieux (eu dzèn), c'est toujours plus que vivre bien (dzèn). Le mieux vivre passe par un changement qualitatif et non par un accroissement quantitatif : à celui qui a faim, il n'est pas besoin de mets compliqués ; une nourriture saine et équilibrée suffit. L'homme qui ne sait pas distinguer les désirs nécessaires de ceux qui ont leur source dans l'opinion, et qui courre inlassablement après des plaisirs superflus, ne saurait vivre mieux. [...]
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