Il est « interdit d'interdire » clamaient les étudiants lors de la révolution culturelle de mai 1968. Par là, ils entendaient mettre à plat tous les tabous – notamment sexuels – qui avaient été transmis de génération en génération, des années durant. Mais un tel slogan semble déjà abusif. Car il est difficile d'imaginer une société où il serait « interdit d'interdire », c'est-à-dire où la seule règle serait l'impossibilité d'interdire quoi que ce soit.
Il faut tout d'abord fixer ce que l'on entend par « interdit », qui est un terme trop courant pour ne pas être équivoque. Il désigne ce qui est défendu de manière absolue, c'est-à-dire ce qui n'est pas autorisé. Il en existe dans des domaines aussi divers que la religion, la morale, le droit, la médecine... Mais il faut noter qu'à la différence des impossibilités (ce que les lois de la nature ne permettent pas), les interdits peuvent être transgressés. Il relève de la responsabilité de chacun de respecter (ou pas) les interdits qui pèsent sur la société. Ce dernier point est fondamental car permet de comprendre que les interdits ne sont pas des règles figées. Ils peuvent – et la plupart doivent – évoluer avec la culture ou le groupe de personnes sur lesquels ils s'appliquent.
[...] Et leur finalité est multiple. Ils assurent la cohésion de la société, garantissent la liberté des hommes ou maintiennent une forme d'égalité entre les citoyens que l'évolution naturelle à tendance à détruire. La question de la nécessité d'interdits dans une société ne fait pas débat. Mais, la difficulté réside dans leur légitimité. Ils sont comme une balance trop sensible. Trop lourds, trop nombreux, ou trop légers, ils sont perçus comme des entraves à la liberté. Tout est donc affaire de dosages. [...]
[...] Réalisant que la cause de la guerre entre les hommes n'est autre que le droit illimité que possède chacun, il se résoudra à y renoncer. Mais un tel abandon n'est efficace qu'à la condition que chacun s'y soumette. Hobbes imagine donc que, à un moment donné, chacun s'engage, par un contrat avec chacun, à renoncer à son droit naturel. Un tiers est désigné pour veiller à ce que ce contrat soit respecté. Par cet acte, les hommes s'arrachent à l'état de nature. Mais renoncer à son droit naturel revient à mettre en place les premiers interdits. [...]
[...] Mais, pour qu'elle soit acceptée de tous, il faut que les hommes qui s'y soumettent obtiennent une contrepartie. Une société légitime doit donc être fondée sur une convention, et cette convention doit rendre l'obéissance avantageuse à tous ses contractants. C'est ici que réside la clé qui permet la mise en place d'une société durable. En ce qui concerne les interdits, la règle est la même. Il ne s'agit pas, lors du passage à l'état social, d'imposer des interdits afin de régler la vie en société. [...]
[...] Pour Spinoza, cette définition de la liberté n'est certainement que superficielle. Car, pour lui, la liberté ne passe par une plus grande possibilité d'action, mais par une augmentation de la connaissance qu'à l'homme de la nature. Il n'en est qu'un schème, et, en tant que schème, il est une être déterminé, quoi qu'il fasse. Telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent de posséder et qui consiste en cela seul que les hommes ont conscience de leurs appétits et ignorent les causes qui les déterminent et sont conscients de leurs appétits disait-il. [...]
[...] Rousseau réfléchira à cette question dans Le contrat social. Nous avons vu qu'il identifiait le passage à la vie en société comme l'abandon, par tous les hommes, au moyen d'un contrat, des droits illimités dont ils jouissaient jusqu'alors. Mais, Rousseau n'exclut pas la possibilité d'une régression dans un nouvel état de nature, par excès de force et de corruption, bien éloigné de la pureté originelle. L'acte par lequel les hommes renoncent à leurs droits illimités eux-mêmes ne vaut donc rien s'il n'est pas accompagné de règles qui garantissent la durabilité des sociétés. [...]
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