On qualifie ordinairement d'infini ce qui n'a pas de fin, ce qui est inachevé, ce qui est illimité, sans bornes… Nous avons donc un terme « infini » qui nous permet de désigner cette réalité, « l'infinité », bien que négative « sans bornes ». Pour l'Homme, qui est un être sans cesse confrontés à des limites, dans le temps, dans l'espace, dans ses capacités même, concevoir l'infini, se représenter une réalité qui n'aurait pas de limites par un concept, peut sembler être une difficulté, et enfermer l'infini dans un concept peut même sembler contradictoire. Peut-on concevoir l'infini ?
Selon la définition proposée par Arnault et Nicole dans La logique ou l'art de penser, « on appelle concevoir la simple vue que nous avons des choses qui se présentent à notre esprit, un soleil, une Terre, un arbre, un rond, un carré, la pensée, l'être ». De fait, le simple fait que nous ayons un terme pour désigner ce qui est infini suffit à faire dire que nous pouvons le concevoir. Et la notion même d'infini mathématique, constitué en objet de connaissance et d'étude, vient conforter cette idée.
[...] Cette distinction entre l'indéfini qu'étudient par exemple les mathématiques, et l'infini qui est exclusivement Dieu, pose problème. Leibniz montre que si nous n'avions pas une connaissance de l'infini mathématique, alors nous n'aurions non plus aucune connaissance certaine de Dieu De fait, il est possible de penser que l'infini des mathématiques entre pour une part dans l'infini de Dieu, du moins que les deux ont parties liées, fussent de petites parties. Dans le commentaire qu'il donne du 26, il admet bien qu'il y ait une différence entre savoir quelque chose d'un objet et comprendre mais c'est pour ajouter immédiatement que nous savons bien des choses de l'infini Il écrit : Bien que nous soyons des êtres finis, nous pouvons savoir bien des choses concernant l'infini, par exemple, sur les lignes asymptotiques, c'est-à-dire celles qui, prolongées à l'infini, se rapprochent de plus en plus sans jamais coïncider ; sur les espaces dont la longueur est infinie, et dont la surface ne dépasse pas celle d'un espace fini donné [ Autrement, nous n'aurions non plus aucune connaissance certaine de Dieu. [...]
[...] Peut-on concevoir quelque chose qui ne serait jamais en acte ? Si l'Homme se heurte à de si nombreuses contradictions, c'est peut-être parce qu'il essaie de connaître une réalité dont il n'a aucune intuition, une réalité qui le dépasse tellement qu'il ne peut en aucun cas en avoir une idée qui soit à la mesure de l'infini. Peut-être faut-il alors se proposer, au lieu de connaître l'infini, d'essayer de le penser. L'infini est un terme que nous employons pour désigner ce dont nous ne connaissons pas la fin, les bornes, les limites Il désigne donc bien une incapacité de notre connaissance, une limite même de notre intellect et de notre raison. [...]
[...] ) : au-delà d'une certaine distance, on ne "voit" plus rien. L'amélioration des télescopes n'y changera rien.» De fait, on peut remettre en cause nos assises habituelles, si le temps était infini par exemple, comment pourrions-nous expliquer être arrivé en 2004 ? On pourra répondre à cette question que l'organisation du temps est un concept pratique que l'Homme met en place pour avoir des repères vis-à-vis des rythmes de la nature Soit. Mais ne peut-on pas en dire autant de l'infini ? [...]
[...] De fait, l'infini serait réductible à un pur concept humain qui n'aurait d'autre rôle que de déculpabiliser la raison humaine de son incapacité à saisir les choses qui la dépassent. Néanmoins, pour avoir un concept de quelque chose, il faut à la fois un sujet pensant, et un objet réel. Il doit donc bien y avoir une réalité irréductible à l'infini. Ainsi, l'existence même de l'infini est démontrable par un raisonnement par l'absurde, tel que le formule Pascal, dans De l'esprit géométrique, : Toutes les fois qu'une proposition est inconcevable, il faut en suspendre le jugement et ne pas la nier à cette marque, mais en examiner le contraire ; et si on le trouve manifestement faux, on peut hardiment affirmer la première, tout incompréhensible qu'elle est. [...]
[...] Alors elle se figure qu'en pensant l'inconditionné, elle le connaît. De fait, on peut faire une différence théorique entre le processus de pensée et le processus de connaissance, dans cette optique, le résultat sera le même, la raison s'efforcera tout de même de connaître l'infini alors qu'elle en est incapable. De fait, nous pouvons nous demander comment l'approche de Kant peut nous permettre d'affirmer que nous pouvons penser l'infini comme un concept. Il faut alors considérer que la tendance de la raison est de prétendre penser la totalité des phénomènes, c'est-à-dire le monde. [...]
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