L'individualisme est-il une conséquence inévitable de la modernité ?

Résumé du document

La Révolution Française, souvent considérée comme le passage à la modernité, est également liée à l'émancipation de l'individu et donc à l'individualisme. On pourrait définir ce phénomène par la place centrale qu'occupe l'individu dans son propre système de valeurs. Si, dans le cas de la Révolution Française, la modernité et l'individualisme sont apparus en même temps, ces deux phénomènes sont-ils nécessairement liés? On peut d'abord voir comment l'individualisme est inséparable de la modernité. Toutefois, les excès liés à l'individualisme ne constituent-ils pas une menace pour la modernité? Enfin, l'autonomie, plus que l'individualisme n'est-elle pas le propre du projet moderne?

Extraits

[...] On voit alors que si l'individualisme est une conséquence inévitable de la modernité, puisque il y a une rupture avec la tradition, c'est la transformation de l'individu en sujet qui est la base du projet moderne. C'est ce qu'illustre l'esprit des Lumières, qui incite l'homme à réfléchir, à s'écarter des superstitions. Cette distinction, essentielle entre individu et sujet, se retrouve dans la conception de la liberté, qui va de pair avec l'individualisme - ce n'est que par la liberté que l'individualisme peut exister. [...]

[...] Dès lors, l'importance prise par l'individualisme n'est-elle pas nuisible à la modernité? S II. L'emprise de l'individualisme dans les sociétés modernes en fait non plus un effet secondaire mais un processus d'atomisation de la société. Les conséquences de ce phénomène peuvent être pernicieuses : l'individualisme n'est pas un processus d'émancipation mais une dictature. C'est ce que tente de montrer Alain Finkielkraut dans La défaite de la pensée. L'existence d'une liberté individuelle ne signifie pas que tous les individus sont capables de l'utiliser au mieux : le fait, pour l'individu, de rompre les liens qui l'attachaient aux anciennes structures communautaires (corporations, Églises, castes ou rangs) ne le rend pas ipso facto apte à s'orienter dans le monde”. [...]

[...] La conception de l'individualisme comme une conséquence inévitable de la modernité est confirmée par le fait que la rupture avec la tradition libère l'individu. En effet, l'homme de la tradition appartient à un groupe : celui de sa famille, de son ordre. En revanche, la modernité n'impose plus de conceptions extérieures. C'est donc à l'individu d'établir son propre système de valeurs, hors de la tradition. Ce processus est décrit par Alexis de Tocqueville dans De la démocratie en Amérique où il oppose les caractéristiques de l'appartenance à l'aristocratie - et donc de la tradition et celles de l'appartenance à la modernité : Les hommes qui vivent dans les siècles aristocratiques sont donc presque toujours liés d'une manière étroite à quelque chose qui est placé en dehors d'eux, et ils sont souvent disposés à s'oublier eux-mêmes C'est la logique de l'héritage : rien n'appartient à l'homme, il ne fait que transmettre et recevoir. [...]

[...] On voit en quoi l'individualisme est une conséquence de la modernité comme rupture avec la tradition. Néanmoins, s'il était déjà souligné par Tocqueville, ce phénomène s'est amplifié dans la période actuelle, qualifiée parfois de postmoderne. Effectivement, l'émancipation de l'individu, si elle est liée au passage à la modernité, n'est pas figée. Le propre de l'individualisme est d'évoluer, puisque ses valeurs ne sont pas imposées extérieurement. Et ce mouvement lié à l'individualisme ne se limite pas aux formes politiques de la modernité. [...]

[...] L'individualisme est-il une conséquence inévitable de la modernité? Introduction Les hommes naissent libres et égaux Cette déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen présente l'homme comme universel -il n'appartient pas à un groupe. L'homme est vu pour lui-même et non pour son appartenance à un ordre. La Révolution Française, souvent considérée comme le passage à la modernité, est également liée à l'émancipation de l'individu et donc à l'individualisme. On pourrait définir ce phénomène par la place centrale qu'occupe l'individu dans son propre système de valeurs. [...]