On dit souvent que les disputes ou l'exclusion naissent de l'incompréhension, au risque pour celui qui ne comprend pas ou qui est incompris de se replier sur lui-même. Toutefois, on reconnaît que ne pas comprendre, c'est avant tout poser la question du pourquoi, et ainsi aller vers l'autre. Dans le premier cas, l'incompréhension est source de conflit, tandis que dans le second cas elle favorise l'échange avec autrui par le biais du questionnement. Comment concevoir que l'incompréhension mène au conflit et à l'enfermement du sujet dans sa conception erronée ou limitée des choses, et qu'en même temps l'incompréhension privilégie l'échange avec autrui et que ce questionnement partagé tient en éveil et enrichit les esprits ? N'est-ce pas la prise de conscience du sujet de son incompréhension, jointe à la volonté de comprendre et d'accepter une réforme de ses pensées, qui permet de découvrir des vérités et de mieux comprendre ? Enfin, ne faut-il pas considérer l'expérience comme l'outil nécessaire à la construction progressive de la compréhension, inscrite dans le temps et la relation à autrui ? L'enjeu du passage graduel de l'incompréhension à la compréhension touche à la liberté de l'homme en ce sens qu'il ne peut véritablement agir librement que s'il est capable de discerner son intérêt et celui de la collectivité.
L'incompréhension est avant tout porteuse de conflits stériles et dangereux dans la mesure où ils favorisent le repli du sujet sur lui-même. Cependant il faut reconnaître que l'incompréhension est aussi un tremplin remarquable vers l'échange avec autrui, qui permet de lutter contre l'endormissement des esprits. Enfin n'est-ce pas l'expérience qui permet graduellement au sujet de tendre vers une compréhension de plus en plus aboutie mais sans cesse à réactualiser d'autrui et du monde.
[...] L'incompréhension risque de pousser celui qui ne comprend pas à se replier sur lui-même et ainsi à s'enfoncer de plus en plus dans son incompréhension et à s'exclure du monde. Or ce retrait de celui qui ne comprend pas n'est-il pas dangereux ? Le repli du sujet sur lui-même risque en effet de renforcer sa conception inexacte des choses par la consolidation de ses illusions et le refus de se remettre en question. Celui qui ne comprend pas a tendance à être en proie aux illusions. [...]
[...] Ainsi, l'incompréhension première de l'enfant va décroissant au fur et à mesure que son expérience de la vie grandit. Il en va de même pour l'homme adulte, qui doit persévérer dans cette recherche de compréhension. Et comme on peut toujours aller plus avant dans la compréhension de soi, des autres et du monde, l'esprit doit sans cesse chercher à mieux comprendre, en tirant les conséquences de l'expérience, c'est-à-dire du contact entretenu avec l'extérieur, sans cesse renouvelé et riche en enseignements. [...]
[...] L'incompréhension favorise ainsi indirectement les illusions et par là même le refus de celui qui ne comprend pas à se remettre en question, ce qui conduit à l'immobilisme dénoncé par Sartre, qui affirme que certains vivants vivent comme s'ils étaient déjà morts L'incompréhension nourrit en ce sens la passivité de l'esprit, qui ne réfléchit plus et n'accepte aucune réforme. Cette passivité de l'esprit est d'autant plus dangereuse qu'elle risque de provoquer un glissement entre ne pas comprendre et refuser de comprendre, ce qui ouvre la voie à l'ethnocentrisme décrit par Lévi- Strauss. Dès lors que je ne comprends pas l'autre dans sa différence, je le rejette puisque j'érige ma pensée et mes valeurs arbitrairement comme une norme. L'incompréhension risque alors de mener bien plus loin qu'au conflit : au racisme ou à la guerre. [...]
[...] Toutefois, on reconnaît que ne pas comprendre, c'est avant tout poser la question du pourquoi, et ainsi aller vers l'autre. Dans le premier cas, l'incompréhension est source de conflit, tandis que dans le second cas elle favorise l'échange avec autrui par le biais du questionnement. Comment concevoir que l'incompréhension mène au conflit et à l'enfermement du sujet dans sa conception erronée ou limitée des choses, et qu'en même temps l'incompréhension privilégie l'échange avec autrui et que ce questionnement partagé tient en éveil et enrichit les esprits ? [...]
[...] En ce sens l'incompréhension est un tremplin vers l'échange avec l'autre si elle est accompagnée de la volonté de comprendre. Etant donné que le sujet ne se borne plus à sa conception des choses, il fait l'effort d'étudier celles des autres avant de les rejeter. Et c'est à travers le dialogue que chacun peut exposer ses arguments et s'assurer que l'autre suive pour parvenir à une meilleure compréhension. La maïeutique socratique s'applique ainsi à faire accoucher les esprits et à mener l'interlocuteur à la compréhension par l'accord des esprits. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture