La tradition biblique présente l'homme comme l'être à qui Dieu destine la nature. Les hommes seraient certes des créatures, au même titre que les autres êtres vivants, mais ils jouiraient d'une place à part dans la nature en tant que la nature serait là pour servir l'homme. Pourtant, la science montre que les hommes s'inscrivent dans l'histoire de l'évolution des espèces : leur originalité dans la nature ne serait donc qu'une conséquence d'un processus qu'ils ne maîtrisent pas.
D'où le problème : les hommes sont-ils des êtres naturels dont la spécificité serait d'occuper une place privilégiée dans la nature, ou bien échappent-ils à tout déterminisme, de sorte qu'il n'y aurait pas de nature humaine ?
[...] Alors que la nature en général est un ensemble de phénomènes régis par des lois universelles et nécessaires, et donc prévisibles, on peut prévoir une éclipse solaire, l'homme, lui, est principe des futurs (Aristote). Doué de raison et de mémoire, capable d'anticipation, l'homme choisit librement ses préférences, ses valeurs mais aussi ses actes, sans pour autant pouvoir en prévoir l'issue, précisément à cause de la contingence qui caractérise le monde humain, celui de la liberté. L'homme choisit et se choisit: son existence n'est pas une pure actualisation de possibles prédéterminés; il n'est précédé d'aucune nature, c'est-à-dire ici d'aucune essence. [...]
[...] En tant que chose en soi, l'homme se choisit, et s'extrait par là du déterminisme qui régit la nature. Les hommes sont donc des êtres à part dans la nature, et chaque homme est un être à part par rapport aux autres, parce qu'il est libre est donc inexplicable: on ne peut prétendre le connaître complètement. En effet, la conscience lui permet de se donner à lui-même ses propres fins et de faire varier les moyens de satisfaire celles que lui impose la nature. [...]
[...] Les hommes sont-ils des êtres à part dans la nature ? La tradition biblique présente l'homme comme l'être à qui Dieu destine la nature. Les hommes seraient certes des créatures, au même titre que les autres êtres vivants, mais ils jouiraient d'une place à part dans la nature en tant que la nature serait là pour servir l'homme. Plus encore, la liberté et l'intelligence permettent à l'homme d'être le maître de la nature non seulement parce qu'il la possède, mais aussi parce qu'il la comprend et donc la domine. [...]
[...] Mais l'homme, en tant qu'être doué de liberté, peut échapper au déterminisme naturel: une action illégitime comme le vol, aussi nécessaire soit-elle d'un point de vue phénoménal, demeure contingente d'un point de vue moral. Le vol aurait pu ne pas être commis, parce qu'il aurait dû de ne pas l'être. La conscience de la loi morale révèle la possibilité pour l'homme de s'excepter du déterminisme naturel, de s'arracher à l'ordre de la succession de la cause et de l'effet dans le temps. En tant qu'être raisonnable et libre, l'homme est donc un être à part dans la nature. Ainsi, les hommes contrairement aux autres êtres, n'ont pas de nature fixe. [...]
[...] L'homme est donc un être à part dans la nature car lui seul n'a pas de nature: pour lui l'existence précède l'essence (Sartre, L'existentialisme est un humanisme). L'individu n'est pas seulement un exemplaire d'une espèce dont il tirerait ses caractères: chaque individu est en quelque sorte à part car l'homme n'est d'abord rien il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il ne sera fait (ibid.). Cette absence de nature humaine fonde alors non seulement l'absolue liberté de l'individu, mais garantit aussi l'égalité entre les hommes: on peut bien dire que les hommes sont des êtres à part dans la nature dans la mesure ou ils échappent tous au déterminisme naturel. [...]
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