Partir des idées largement partagées selon lesquelles le travail est une activité pénible, asservissante, dont on aimerait bien se passer si cela était possible, tandis qu'au contraire le plaisir et la liberté s'accomplissent en dehors du travail. On dit même de beaucoup d'hommes qu'ils travaillent « comme des bêtes ». D'où la question du sujet. Définitions élémentaires du travail et de la déshumanisation de l'homme entendue comme ce qui conduit l'homme à perdre son humanité, ce qui fait sa dignité d'homme (...)
[...] Mais par ailleurs, il convient de s'interroger sur l'idée de déshumanisation Au sens fort, déshumaniser veut dire : enlever à l'homme sa nature d'homme, le faire retomber au stade seulement animal. En un autre sens, déshumaniser signifie: ôter à l'homme la capacité de développer ses qualités les plus remarquables, qu'elles soient d'ordre psychique (courage, patience, persévérance, etc.) ou intellectuel, de telle sorte que disparaisse la maîtrise de soi. En un dernier sens, déshumaniser peut signifier rendre inhumain c'est-à-dire privé de sens moral Peut-on dire que le travail déshumanise l'homme au premier sens du terme ? [...]
[...] Noter toutefois qu'il ne s'agit là que d'exemples historiques qui ne peuvent suffire pour clore l'argumentation car ces exemples ne portent pas sur toute l'humanité. Or, dans le sujet, on s'interroge sur l'homme et une partie de la question est de savoir s'il s'agit de l'humanité toute entière ou des individus qui la composent. Que le travail soit déshumanisant pour de nombreux hommes, l'histoire en atteste mais cela ne suffit pas pour affirmer que le travail est déshumanisant pour l'homme en général. [...]
[...] Transition : ce dépassement d'Aristote ne nous invite-t-il pas1)à revaloriser le travail pour l'humanité entière et à chercher ailleurs que dans le travail lui-même les raisons pour lesquelles certains hommes (il faut avouer : le plus grand nombre) sont dépossédés de toute possibilité de développer leurs qualités (sans pour autant jamais perdre leur nature d'homme). Deuxième partie : certaines conditions rendent le travail déshumanisant En soi, le travail n'est pas déshumanisant au sens où il empêcherait les hommes de développer leurs qualités techniques, intellectuelles et même psychiques. Le travail permet aux hommes de se rendre comme maîtres et possesseurs de la nature »(Descartes) d'apprendre à maîtriser leurs propres désirs ;3)de progresser dans leurs capacités intellectuelles et techniques sous le regard d'autrui. [...]
[...] Il reste toutefois que le travail étant le lieu où les hommes peuvent rivaliser entre eux (soit directement-en essayant de se dépasser les uns les autres- soit indirectement- en consommant les objets qui ont le plus de prix aux yeux des autres), il y dans l'excitation des désirs causée par le travail productif, quelque chose de fascinant auquel on peut bien comprendre que cèdent beaucoup d'hommes compris les grands de ce monde) ; Certes, il n'y a rien là de supérieur sur le plan spirituel ; mais l'être humain ne se réalise-t-il pas également dans ce qu'il y a de moins élevé spirituellement ? Autrement dit : la déshumanisation spirituelle n'est-elle pas une manière, certes contradictoire, de se réaliser en tant qu'homme ? Conclusion : Le travail ne déshumanise pas l'homme au sens où il le ravalerait au rang de la bête. [...]
[...] Pourtant, il faut reconnaître que beaucoup d'hommes sont déshumanisés dans leur travail. Voir le thème de l'aliénation du travail chez Marx (et seulement chez lui) : par définition, l'aliénation du travail est une forme de déshumanisation puisque le travailleur aliéné perd toute capacité à développer ses facultés et sa volonté. Ce ne sont pas seulement les travailleurs aliénés qui sont déshumanisés (au sens 2 du terme) ; on peut en effet soutenir qu'à partir d'un certain niveau d'exploitation (qu'il est difficile de déterminer précisément) ceux qui exploitent les travailleurs ( et qui travaillent à le faire) sont eux- mêmes déshumanisés (au sens 3 du terme) : ils finissent par perdre tout sens moral et par considérer les relations humaines dans le travail avec le plus grand cynisme. [...]
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