Envisager l'omnipotence de la force conduit à une double impasse : impasse technique car certaines formes de pouvoir échappent à son emprise, impasse politique incarnée par la conception théorique de l'état de nature. Le droit seul permet de sortir de cette impasse; dans le modèle théorique par un contrat social qui permet de sortir de l'état de nature et dans les systèmes juridiques internes et internationaux, le droit cherche à confisquer les pouvoirs de la force. La force n'est pas rendue impotente pour autant et l'on peut s'interroger sur l'indépendance du droit par rapport à la force...
[...] En matière de relations internationales, le droit n'a pas rendu la force impotente ; elle dispose toujours de pouvoirs importants sur lesquels il ne peut rien. Peut-on même aller plus loin et mettre le droit au service de la force ? Les criminels nazis devant le Tribunal de Nuremberg, comme le feront après eux d'autres accusés de crime de guerre et contre l'humanité tel Milosevic, cherchent à saper la légitimité de leur procès en l'inscrivant dans la droite ligne de tous les règlements de conflits. [...]
[...] Bush devant le Congrès et Colin Powell à l'ONU), la force montre sa faiblesse. Le droit seul permet de sortir de cette impasse de l'omnipotence de la force ; dans le modèle théorique par un contrat social qui permet de sortir de l'état de nature et dans les systèmes juridiques internes et internationaux, le droit cherche à confisquer les pouvoirs de la force. L'homme est un loup pour l'homme et l'homme est un dieu pour l'homme Par cette formule, Hobbes souligne la nécessité de sortir de l'état de nature et montre la voie qui le permet. [...]
[...] Le droit peut être perçu comme la force des faibles. C'est l'idée qui domine la pensée de Robert Kagan dans La puissance et la faiblesse, éclairage donné à la confrontation d'idées entre Europe et Etats-Unis au sujet de la guerre en Irak. Déterminer qui des uns ou des autres a raison ou tord est un mauvais débat : chacun a les idées de ses moyens. L'Europe, car elle est faible, se fait ici l'avocat du droit international en plaçant au-dessus de tout les principes de respect des conventions internationales et du rôle suprême de l'ONU dans le règlement des conflits et dysfonctionnements de la planète. [...]
[...] Sans cette preuve de manquement aux obligations, le recours à la force ne se fait plus sous l'autorité du droit mais contre lui. Prenant acte de la confiscation des pouvoirs de la force par le droit, l'Europe ne pouvait que s'opposer à cette opération militaire. A l'inverse, les Etats-Unis considèrent que dans les relations internationales le droit est l'arme des faibles. Assumant le pouvoir que leur donne leur force, ils n'ont aucune raison de se placer sous l'autorité du droit international ; tout juste ont-ils cherché à l'ONU à se revêtir de l'apparat du droit pour rendre la force moins arrogante. [...]
[...] On passe alors de l'omnipotence de la force dans l'état de nature à son impotence dans l'état de société. Même le plus fort des hommes ne peut se prévaloir d'aucun droit sur ses semblables autre que celui que lui confère son appartenance à la société. Le droit a confisqué la force. On retrouve cette idée de confiscation de la force par le droit chez Rousseau, dans sa conception d'un contrat social : une forme d'association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s'unissant à tous n'obéisse pourtant qu'à lui-même et reste aussi libre qu'auparavant. [...]
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