L'homme ne vit pas seul : il peut certes s'isoler à l'âge adulte, mais il ne peut devenir un homme sans l'aide d'autrui.
Les rares exemples d'enfants sauvages témoignent tous de l'incapacité à devenir pleinement homme sans l'aide d'autres hommes (...)
[...] La prise de conscience de la singularité de son être propre est indissoluble de la prise de conscience de la singularité d'autrui. Cette double prise de conscience, Hegel l'appelle la lutte pour la reconnaissance. Etre conscient de soi, ce n'est pas simplement se regarder dans un miroir, prendre une distance théorique par rapport à soi. La conscience de soi s'inscrit dans des conflits de désirs, de volonté, de liberté. La conscience de soi procède d'un désir d'être reconnu par autrui comme étant une conscience à part entière. [...]
[...] La vraie morale se moque de la morale (Pascal) Le regard d'autrui sur soi. Le regard de l'autre sur ce qu'on paraît être. Pascal dit que l'amour que l'on a pour un autre (ou qu'un autre a pour soi) n'est jamais l'amour de ce qu'il est (ou de ce qu'on est), mais seulement de ce qu'il paraît (ou de ce qu'on paraît) être : on ne connait, ni n'aime, le moi mais seulement ses qualités. L'autre comme regard n'est que cela : ma transcendance, transcendée - Sartre. [...]
[...] Certes, je désire la protection d'autrui lorsqu'il m'est proche, et je redoute son hostilité lorsqu'il m'est inconnu. C'est ainsi que Hobbes explique que les individus à l'état de nature, c'est-à-dire en l'absence de lois qui réfrènent leur agressivité, vivent dans un état de guerre. Or Rousseau fait remarquer que la pitié -la sensibilité à la souffrance d'autrui, quel qu'il soit- est un trait naturel de l'homme. Tous les hommes appartiennent à une même humanité. Kant dit qu'autrui, dans sa personne, n'est pas simplement un moyen pour mes fins ; il est une fin en soi, un être dont la raison et la liberté font la dignité de sa personne, une dignité sans prix. [...]
[...] L'homme est d'abord confronté à sa famille, puis à l'ensemble des membres du village, quartier, de la tribu puis aux concitoyens (membres de la même cité, du même pays), et enfin être confronté à l'humanité entière. Tout ce passe comme si chacun sortait lentement de soi en élargissant progressivement son expérience d'autrui. Autrui m'est à la fois familier et étranger. Cette ambivalence est instructive sur les rapports entre les hommes et, plus simplement, sur cette énigme que constitue l'homme. Nous ne faisons pas l'expérience de l'autre en général, mais seulement d'autres êtres singuliers aux expressions, aux comportements propres, que je perçois comme différents de moi. [...]
[...] Ainsi, moi qui, en tant que je suis mes possibles, suis ce que je ne suis pas et ne suis pas ce que je suis, voilà que je suis quelqu'un - Sartre. Les possibles = tout ce qui est possible pour moi = mes choix. Je ne suis pas une nature, sinon tout serait joué d'avance. Or autrui me renvoit, par le regard, à ce qui fait de moi une nature. Autrui est constitutif de la conscience de soi. J'ai honte = je me vois tel qu'autrui me voit. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture