L'on dit parfois de certains regards que s'ils pouvaient tuer... Regarder n'est pas voir. Les yeux sont bleus ou marron, mais le regard, lui, n'a pas de couleur. Il est en deçà de la perception. Il est par excellence le lien de l'autre à moi. Par lui, j'ai affaire directement à l'autre, aux autres. Le regard peut être bienveillant, amical, amoureux même. On dit de certains regards qu'ils sourient. Mais il peut aussi se faire dur, cruel, méprisant. Certains regards vous annihilent plus sûrement que toutes les injures.
[...] Dissertation de philosophie Faut-il craindre le regard des autres? Plan : I. L'être-pour-autrui. II. Le regard et le visage. Introduction L'on dit parfois de certains regards que s'ils pouvaient tuer . Regarder n'est pas voir. Les yeux sont bleus ou marron, mais le regard, lui, n'a pas de couleur. Il est en deçà de la perception. Il est par excellence le lien de l'autre à moi. Par lui, j'ai affaire directement à l'autre, aux autres. [...]
[...] Qu'en est-il, par exemple, du regard amoureux ? Où finit le regard qui désire, où commence celui qui fait de la femme, ou de l'homme, le simple objet du désir? Mais nous n'avons examiné jusqu'ici que de simples qualités du regard, certaines de ses modalités. Aussi l'analyse est-elle arbitraire : nous aurions pu choisir de parler des regards tendres, ou encore des regards de confiance. Voilà pourquoi on ne peut pas s'en tenir à l'exemple de certains regards pour conclure qu'il faille craindre le regard des autres. [...]
[...] C'est vrai que le regard d'autrui peut toujours me juger. Mais il n'y a pas lieu de craindre les autres en tant que tels, ni de s'en méfier, ou de s'en défendre. Leur regard ne comporte pas seulement le risque de me juger ; il signifie avant tout que je suis pour autrui, qu'il est en moi, qu'il me constitue, qu'il est, pour reprendre une autre formule bien connue, la nécessaire médiation de moi-même à moi-même Sartre ne conclut donc pas qu'il faut craindre le regard des autres, au sens où il faudrait se méfier d'eux ou vivre sans cesse sur la défensive. [...]
[...] Rien d'étonnant, donc, que le regard des autres fasse de moi une chose. Mais, à la différence de Sartre, Lévinas pense qu'il existe une relation primitive aux autres qui n'est ni de l'ordre de la perception ni de celui de la connaissance, mais d'ordre éthique. Ainsi, dit-il, l'accès au visage est d'emblée éthique Concrètement, cela veut dire que j'existe pour autrui, et qu'autrui existe pour moi sous la forme d'un visage, et ce visage, à proprement parler, on ne le regarde pas, on ne le voit pas : ce serait le dévisager le nier comme visage. [...]
[...] Alors, faut-il craindre le regard des autres ? Que doit-on craindre au juste ? D'être jugé, d'être confronté à l'arrogance du suffisant ou à la misère du mendiant qui vous implore du regard? Craint-on de voir toutes les défenses que l'on se construit péniblement céder sous cette subite intrusion de l'autre au plus intime de soi-même ? Mais, s'il y a largement de quoi donner un sens psychologique à ce sujet, et le nourrir de nos expériences quotidiennes, il prend également un sens philosophique quand on s'avise que, par le regard, c'est l'être même du sujet que je suis, c'est ma subjectivité qui perd quelque chose de sa certitude. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture