« Chaque progrès donne un nouvel espoir, suspendu à la solution d'une nouvelle difficulté. » déclarait Levi-Strauss au XXème siècle dans Le cru et le cuit .
La technique, après avoir longtemps contribué à la survie de l'humanité, est en train de devenir l'une de ses préoccupations majeures. Celle-ci est ambivalente : elle apparaît aussi bien aliénante que dangereuse, elle a servi la condition humaine et l'a également desservi. De ce fait, le progrès technique peut faire naître, chez l'homme, de l'espoir comme de la crainte. En pleine ère d'avancée technique, il apparaît nécessaire de nous demander s'il est souhaitable que l'homme accorde sa pleine confiance au progrès.
L'homme est, à priori, amené à avoir confiance dans le progrès parce qu'il œuvre à l'amélioration de sa condition. De plus, il doit avoir confiance dans ce qu'il fait pour pouvoir progresser. Donc, s'interroger sur la confiance accordée au progrès technique ce sera s'interroger sur la confiance accordée à l'homme lui-même. A partir du moment où l'homme crée la technique, celle-ci est faillible puisqu'elle est à l'image de l'homme.
Alors, quelle est l'attitude la plus raisonnable à adopter face au progrès technique ? Faut-il envisager le progrès avec confiance comme une source de bienfaits, ou au contraire s'en effrayer comme ce qui peut causer notre perte ?
Quel est l'impact de la technique sur la condition humaine ? Si le progrès technique est aliénant pour l'homme et entraîne sa régression, peut-on imaginer un progrès moral qui soit conséquence d'un progrès technique ?
[...] En ce sens, Hans Jonas (XXème siècle) rejoint un peu la logique de Kant lorsqu'il en appelle à une éthique de responsabilité qui doit s'articuler sur une politique publique de contrôle de la technique. Il est donc souhaitable d'avoir un usage responsable de la technique. Il est souhaitable de l'appréhender pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un moyen, et non comme une fin. La logique de la technique est malheureusement la réalisation de tous les possibles. Elle ne se pose pas la question du pourquoi, mais seulement du comment. Or ce n'est pas parce que l'on peut que l'on doit ! [...]
[...] Par conséquent, mieux vaut encadrer le progrès technique, en faire bonne usage, que le réprimer. Et s'il y a décadence morale cela ne peut venir que du désir qui supplante le devoir et non pas d'un simple pouvoir donné par la technique qui n'est qu'un outil: on peut dire oui à la technique, à la technique maîtrisée. L'homme devrait donc pouvoir maîtriser ses inventions et réfléchir correctement aux conséquences de celles-ci avant de devoir réparer les dégâts occasionnés par une utilisation inconsciente des techniques. [...]
[...] De nos jours, on ne pourrait même plus survivre sans la technique. Au lieu de la servir, l'homme devient plutôt obligé de servir pour tous ses actes, même les plus anodins de sa vie. Autre modification profonde de nos comportements, le bonheur tient désormais de la possession de choses matérielles, et de ce fait découle de la course effrénée à la productivité, dans laquelle les sociétés modernes se sont engagées. De ce fait, le monde se déshumanise en se matérialisant. [...]
[...] Fruit d'un manque, elle consacre la supériorité de l'être humain et est émancipatrice. Alors, si la technique semble différencier l'homme de l'animal c'est qu'elle est essentiellement humaine. De plus, l'homme, en transformant la nature à son profit, se transforme lui-même, il s'humanise. En somme, il n'est pas légitime de critiquer le progrès technique au sens de déshumanisation ou d'aliénation. Platon témoigne, par le mythe de Prométhée, de sa foi dans la technique pour améliorer le sort de l'homme et, se faisant, sous-entend que l'invention et la manipulation sont inhérentes à l'humanité. [...]
[...] En somme, la technique n'ajoute rien à notre bonheur et l'exemple des sauvages [ ] semble confirmer [ ] que tous les progrès ultérieurs ont été en apparence autant de pas vers la perfection de l'individu, et en effet vers la décrépitude de l'espèce. ajoute Rousseau dans son Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes (1755). Bien plus, Rousseau pense que l'ouverture première du progrès technique nous ouvre aussi vers l'infini des besoins et l'invention n'aura plus de cesse. Selon lui les premiers progrès mirent l'homme à portée d'en faire des plus rapides. Plus l'esprit s'éclaircit, et plus l'industrie se perfectionna. Satisfaire le superflu par la technique pousse l'homme à inventer, de cette manière il atteint l'artificiel. [...]
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