Le bonheur peut se définir comme un état stable et durable de satisfaction personnelle. Le rechercher implique de faire ce qui est bon pour soi, ce qui nous rend heureux personnellement. Faire son devoir implique au contraire l'idée d'un certain renoncement à ses intérêts personnels, voire un certain sacrifice de soi, en vue de l'intérêt des autres. Ainsi, la recherche du bonheur et la recherche du bien semblent donc bien être deux buts très distincts. C'est pourquoi d'ailleurs, on peut très bien imaginer un individu mauvais mais heureux, et inversement un homme d'une grande moralité très malheureux, comme l'illustre par exemple le personnage de Gilliatt dans Les travailleurs de la mer de Victor Hugo. Gilliatt, exemple de vertu morale, est le plus malheureux des hommes, car sa promise ne l'aime pas. On pourrait même aller jusqu'à penser qu'il s'agit de deux activités incompatibles dans la mesure où ils visent deux buts contradictoires ; lorsque je m'occupe de moi, je ne m'occupe pas des autres ; et inversement, lorsque je m'occupe des autres, mon bonheur personnel passe au second plan (...)
[...] Faire son devoir et rechercher son bonheur semblent donc deux buts, non seulement distincts, mais opposés. La contradiction bonheur / morale. Rechercher son propre bonheur personnel peut même entrer en contradiction totale avec le devoir moral. Un hédonisme radical et débridé pourrait ainsi très bien se représenter le bonheur comme le plaisir de braver tous les interdits moraux, le plaisir de transgresser le devoir moral. On trouve une illustration éclatante de cette conception chez le marquis de Sade par exemple qui montre que le plaisir, la jouissance véritables viennent de la transgression des normes morales. [...]
[...] On voit alors que faire son devoir, se comporter de manière morale peut apparaître comme une condition d'un bonheur au sens fort, d'un bonheur véritable. Vivre dans un monde juste est plus propice au bonheur de chacun Faire son devoir, c'est favoriser l'avènement d'un monde plus juste, plus moral, un monde où la maxime de chacune de mes actions pourrait être universalisée sans contradiction. Or, un tel monde, une telle société semble plus propice à l'épanouissement et au bonheur de chacun, y compris le mien propre. [...]
[...] A l'inverse, celui qui est malheureux, qui souffre aura peut-être davantage de difficulté à prendre en compte l'intérêt d'autrui. On lui accordera en tout cas des circonstances atténuantes partant du principe que nul n'est méchant volontairement comme le disait Socrate. On voit alors que le rapport aux autres apparaît comme une composante essentielle du bonheur. Faire son devoir peut ainsi favoriser, de manière indirecte et médiate, le bonheur (par la reconnaissance d'autrui). Et être heureux peut avoir tendance à favoriser une disposition d'esprit moral. [...]
[...] Par contre, chercher son propre bonheur au même titre que celui de chaque être humain sur terre (non par inclination naturelle mais par respect de l'humain en tout homme) peut-être considéré comme un devoir. En ce sens, et en ce sens seulement, rechercher son bonheur peut être considéré comme un devoir. La distinction bonheur / vrai contentement En dépit de certains liens de complémentarité possibles, la vertu morale ne mène pas nécessairement au bonheur sensible sur terre. Nous l'avons vu avec la figure de Gilliatt par exemple. [...]
[...] La finitude de l'homme semble l'empêcher de connaître radicalement le bonheur sur terre. Et un comportement moral n'y change rien. Il n'empêche pas de vieillir, de prendre des cheveux blancs, de perdre des êtres chers, de tomber gravement malade, et de mourir enfin. Par contre, le comportement moral peut mener (sans que cela en soit le but, sans quoi toute valeur morale serait annulée), non au bonheur sensible (de toute façon inaccessible) mais au vrai contentement qui est la fleur du comportement moral. [...]
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