Quiconque se soustrait à l'impôt s'expose à des sanctions judiciaires au motif que la justice considère que la désobéissance constitue un choix délibéré, sous réserve bien sûr que la personne soit reconnue responsable de ses actes. A l'inverse, la question de l'obéissance semble à première vue ne pas s'inscrire dans une démarche de choix aussi évidente. Je choisis de désobéir en me soustrayant à l'armée, à l'impôt, à mes obligations parentales, etc., mais fais-je encore un choix lorsque je me soumets — ou semble me soumettre — à mes devoirs ? Autrement dit, faire son devoir, est-ce un choix ?
[...] De la même manière que la soustraction à l'un de ses devoir est un choix opéré à par l'individu pour se mettre en conformité avec son système de valeur (Rosa Parks refusant de s'asseoir dans la partie du bus réservée aux Noirs), de même l'action d'obtempérer procède elle aussi d'un choix. Conclusion Ainsi, la question du rapport entre le devoir et le choix implique d'interroger le libre arbitre de l'être humain. Si les deux notions semblent a priori s'exclure mutuellement, force est de constater qu'il existe des cas dans lesquels faire son devoir relève d'un choix librement consenti, tandis que d'autres exemples montrent qu'un devoir accompli de manière uniquement formelle, par intérêt vide celui-ci de son contenu moral. [...]
[...] A l'inverse, il apparaît que l'on peut avoir tort de faire son devoir, dans la mesure où le devoir d'un citoyen de la France de Vichy diffère du devoir d'un citoyen vivant en République. De la même manière, on peut avoir cru faire son devoir mais avoir en réalité fait autre chose, comme ménager son intérêt propre. Faire ou ne pas faire son devoir procède par conséquent nécessairement d'un choix, car le libre arbitre n'est jamais aboli, même dans le cas où l'individu regrette un choix, voire en conçoit de la honte ou du regret. [...]
[...] De ce point de vue, la notion même de devoir (en tant qu'impératif moral dépassant le désir de l'individu) s'oppose à celle de choix Par définition donc, le notion même de devoir s'oppose à celle de choix. En effet, en temps qu'impératif moral dépassant le désir premier de l'individu et garanti par des dispositifs contraignants (lois, coutumes, etc.) le devoir peut entrer en contradiction avec les inclinations des individus qui peuvent ne pas trouver légitime de devoir contribuer à l'effort de la collectivité, que ce soit par le temps accordé, la ressource mis à disposition voire le prix de sa vie. [...]
[...] Il y a toujours choix, même dans une situation contrainte : le devoir ne supplante pas le libre-arbitre Par conséquent, ces exemples nous invitent à considérer que même en cas d'obligation formelle, l'accomplissement d'un devoir procède toujours d'un choix. L'opposition apparente entre devoir et choix procède du rapprochement des aspirations individuelles d'une part et des intérêts collectifs d'autre part. En tant qu'individu, mes aspirations visent généralement à l'accomplissement de mon désir ou de mes convictions, et l'adjonction de contraintes juridiques ou matérielle aux obligations vise précisément à garantir le respect de ces obligations, jugées nécessaires par pour le maintien d'une vie en collectivité. C'est la raison pour laquelle à première vue, le devoir supplante le choix. [...]
[...] Pour ce faire, nous verrons donc dans un premier temps que faire son devoir semble à première vue procéder de l'obligation et non du choix, en raison notamment de la contrainte liée à la dimension morale du devoir. Toutefois, il conviendra de voir dans un deuxième temps que le devoir peut faire l'objet d'un libre consentement de la part de l'individu, et qu'inversement, on peut faire son devoir sans pour autant adhérer à son principe moral. Enfin, nous verrons que la notion de devoir ne s'oppose pas à celle de choix dans la mesure où celui-ci, même contraignant, n'abolit pas le libre arbitre de l'individu. [...]
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