Au cours d'une conversation sur un sujet quelconque, il peut arriver que nous évoquions par exemple le thème de la mort. Face à nous, autrui semble troublé, et se met soudainement à pleurer : on apprend alors qu'il a perdu sa mère la semaine dernière ; nous l'ignorions. Ainsi nous l'avons blessé sans en avoir l'intention.
Peut-on alors être tenu comme responsable de ses pleurs ? Avons-nous maîtrisé tous nos dires ? Pouvions-nous prévoir l'effet de nos paroles sur autrui ? Il semble bien difficile en effet d'être totalement maître de nos actes et d'en prévoir complètement les conséquences. N'exprime-t-on alors que ce dont on a conscience ? Il convient d'abord de définir la notion « d'expression », et ensuite de mettre en évidence la complexité de la relation à autrui par l'expression. Quelque chose nous échappe-t-il constamment ? Pourquoi l'interprétation d'autrui est-elle imprévisible ?
[...] Quelque chose nous échappe- il constamment ? Pourquoi l'interprétation d'autrui est-elle imprévisible ? Nous allons donc dans un premier temps analyser le degré de conscience dans l'expression, pour aborder ensuite la multiplicité des occasions d'expression qui nous échappent et leurs conséquences sur le lien qui me lie à autrui. Est-il alors possible d'avoir conscience de tout ce que l'on exprime ? Dans quelles mesures maîtrisons-nous les conséquences de nos différentes formes d'expression ? Le verbe exprimer trouve son étymologie dans le latin premere qui signifie littéralement presser, comprimer. [...]
[...] Quand le tableau passe de son statut de maturation à son statut de réalisation effective, les actes imprévus et les démarches, volontaires ou non, plus ou moins artistiques contribuent à modifier dans leur confrontation au concret l'idée initiale du peintre ; elles contribuent à développer l'idée intérieure du peintre, qui n'était pas comme telle à son stade initial dans l'esprit du peintre. Il en va de même pour les sentiments et les ressentis. Il n'existe, par exemple, aucun amour absolu. Celui-ci est le fruit d'un mélange opéré dans le temps entre nos convictions profondes sur la signification du sentiment amoureux, ce que nous éprouvons intérieurement et les manières d'aimer acquises au travers des films, romans ou même d'un modèle pris sur nos proches. Ainsi l'amour n'est pas absolu. [...]
[...] Selon lui, le signal serait un code simple et défini, qui ne donne lieu qu'à une unique interprétation ; tel en est le cas pour les panneaux de circulation, le Code de la route, les ordres militaires Ainsi le langage et l'expression humaine se distinguent clairement du signal dans la mesure où elle donne lieu, la plupart du temps, à des interprétations diverses, variées, imprévisibles. L'exprimant ne peut ainsi jamais être sûr d'avoir été compris clairement dans ce qu'il a exprimé. Nous ne pouvons en définitive avoir conscience de toutes les formes d'interprétations possibles de l'exprimé. De plus, nous véhiculons par notre expression nos modes et habitudes de vie, nos coutumes, notre culture. [...]
[...] Il est aussi certaines formes d'expression qui permettent de transcender la seule volonté et la conscience. C'est notamment le cas de l'œuvre d'art, comme n'importe quelle autre forme d'expression artistique. On a souvent l'habitude, à tort, de considérer une œuvre d'art comme un simple objet qui se représente dans notre immédiat et de manière directe. Or celle-ci est bien plus qu'un objet concret : c'est, comme nous l'avons vu, un mélange de sentiments de l'intérieur avec l'extérieur qui s'est objectivé sous la forme de l'œuvre artistique. [...]
[...] L'expression est donc relative, changeante, mouvante et relative. Est-il alors possible d'avoir conscience de ce que l'on va exprimer, quand bien même l'expression serait changeante ? Il existe, nous l'avons vu, un échange entre l'intérieur et l'extérieur. Ainsi chacun contribue à modifier l'autre dans ce mélange dynamique, pour former un produit synthétique des deux : l'exprimé. Celui-ci est divisé entre ce qui provient de l'intérieur est ce qui est inhérent à notre extérieur. Au sens d'Hegel, ce mouvement serait caractérisé de dialectique Pour lui, la forme d'expression la plus finie est l'expression philosophique. [...]
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