Dans Bouvard et Pécuchet, Flaubert nous décrit ironiquement Pécuchet en train de s'agiter frénétiquement dans sa baignoire pour voir si la température de l'eau monte. Les deux héros retirés à la campagne poursuivent sans relâche une quête naïve du savoir et tentent d'assimiler toutes les connaissances disponibles de leur époque tant au niveau théorique qu'au niveau pratique où ils rencontrent de cruelles déconvenues, comme un refroidissement à la suite de l'épisode de la baignoire ou des problèmes plus sérieux lorsqu'ils tentent d'hypnotiser les poules de leur voisin ! Sans tomber dans le ridicule des deux héros de Flaubert dans leur touchante et naïve croyance en les vertus de la science expérimentale, nous avons tous pratiqué des travaux pratiques en classe de physique ou de science naturelle. Ce simple fait montre bien que dans nos mentalités, ce qu'on considère comme scientifique est intiment liée à la possibilité de l'expérience (...)
[...] La science a reconstruit un monde abstrait à partir du monde de la vie et a en quelque sorte vidé le monde de la vie de son sens. Merleau-Ponty oppose l'expérience commune et ce qu'en fait la science. L'expérience commune trouve une convenance et un rapport entre le geste, le sourire, l'accent d'un homme qui parle. Mais cette relation d'expression réciproque, qui fait apparaître le corps humain comme la manifestation au dehors d'une certaine manière d'être au monde, devait pour la psychologie mécaniste se résoudre en une série de relations causales. [...]
[...] On ne peut pas dériver une loi scientifique d'un ensemble d'observations. Jamais je en pourrai dire que tous les cygnes sont blancs si je ne me fonde que sur l'observation répétée que j'ai pu faire de nombreux cygnes blancs. Dans ses Problèmes de Philosophie, Russell nous met en garde avec humour contre les risques de l'induction en nous racontant la triste mésaventure d'une dinde inductiviste qui s'est vu trancher le col alors qu'elle avait toujours pu observer dans le passé que son soigneur ne venait dans l'enclos que pour lui apporter sa nourriture. [...]
[...] La définition ostensive n'est pas individuelle, mais contrôlable collectivement. Dans Les Enoncés scientifiques et la réalité du Monde extérieur, Schlick écrit : Nous devons insister sur ce fait que l'impression sensible isolée, invoquée pour le contrôle d'une proposition ne doit pas en général être considérée comme isolée, mais qu'il s'agit surtout de régularité, de rapports constants. Ces derniers permettent les véritables contrôles et évitent les illusions et les hallucinations. Donc si je considère un objet bien défini par sa description et si j'ajoute qu'il est réel, je veux affirmer une corrélation parfaitement déterminée entre certaines de mes expériences vécues. [...]
[...] C'est pourquoi l'observation dans la science peut même se transformer en une exprimer de pensée qui n'est pas une expérience dans le réel. Dans l'ouvrage de Galilée, sont porte-parole Salviati affirme : Moi, sans expérience, je suis sûr que l'effet s'en suivra comme je vous le dit puisqu'il est nécessaire qu'il s'ensuive. L'expérience de pensée est nécessaire en physique quand l'expérience réelle est irréalisable. L'expérience de la pierre qui tombe verticalement du mât si la vitesse du bateau est uniforme est une expérience de pensée jusqu'à ce que Gassendi la réalise en 1641. [...]
[...] Seule la science peut nous permettre d'accorder crédit ou non à nos observations. La science ne peut donc pas dériver de l'expérience puisque c'est elle qui permet de corriger l'expérience et de l'interpréter correctement. L'observation porte sur une nature changeante, en devenir. Elle est propre à nous donner le vertige comme le note Platon dans le Théétète. De plus, elle nous fait voir le contraire de la vérité. Je vois la diagonale d'un carré de côté 1 comme un segment fini alors que les mathématiques me disent que ce segment représente un nombre infini. [...]
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