Le concept de mort est loin d'être univoque. La mort peut, en effet, se définir, de la manière la plus immédiate et la plus empirique, comme le terme de la vie humaine, en tant que celle-ci est considérée dans le temps. Le concept de finitude est inhérent au vivant lui-même. Mais la mort peut aussi être envisagée comme structure a priori de la conscience de l'homme. C'est cette ambiguïté qu'il s'agit de questionner (...)
[...] Mais que signifie le désespoir au plus profond de lui-même ? Apparu dans la discordance et la rupture de la synthèse humaine, le désespoir n'en reste pas moins traversé par l'expérience d'échapper à la mort, tant celle-ci paraît incompréhensible au moi subjectif. Le désespoir se distingue donc de la désespérance, qui se caractérise par la perte de toute confiance et de toute ouverture sur l'avenir. L'espérance est alors le moteur puissant qui pousse l'homme à se construire dans ses œuvres pour échapper au néant et pour maintenir l'union du fini et de l'infini, qui est sa réalité même. [...]
[...] N'est-ce pas la conscience de la mort qui révèle l'urgence de vivre et la valeur de la vie ? Explicitation du contenu de la question : la mort perçue comme un drame La certitude de ma mort est enveloppée dans une série de paradoxes. Nous ne croyons pas vraiment et totalement en notre mort, envisagée empiriquement comme décès. Celle-ci renvoie à l'irréversibilité du temps, qui nous entraîne inexorablement vers la fin de la vie, l'absence de vie. Nous savons que la mort est notre lot mais nous n'en sommes pas totalement certain du point de vue subjectif. [...]
[...] L'existence se nourrit de significations. Cette volonté de sens risque sans cesse de la faire basculer de l'authenticité vers l'inauthenticité Dans l'angoisse devant la mort, la réalité humaine est mis en présence d'elle-même et livrée à sa possibilité indépassable. La certitude de la mort devient celle de la mort comme possibilité propre et spécifique de l'homme et comme sens authentique de son existence. Ainsi, cette certitude apparaît comme le chemin d'une sagesse purifiée de tout désespoir : sagesse de détachement à l'égard des fins humaines, refus de vivre ces fins dans l'absolu. [...]
[...] Ma synthèse et mon organisation, comme sens et projection vers l'infini, sont donc déstructurés. En me condamnant au non sens, cette certitude détruit tous mes liens au réel et me dévaste, me conduisant à la douleur absolue. Mon moi est désaffecté et mes participations au monde se défont. Ce non sens t cette destruction peuvent condamner mon moi à la désagrégation totale. La synthèse humaine se disloque parce qu'elle est vouée uniquement à la finitude, et que j'ai conscience de cette limite à ma projection vers. [...]
[...] Cette reconnaissance entière de la mort au sein de la vie mène au delà de la dualité ordinaire entre la vie et la mort, ce que Michel Henry nomme la Vie absolue. Si l'espérance et la foi traversent le désespoir, alors la certitude de sa mort permet néanmoins au sujet de s'accomplir et d'accomplir la personne. Sans espérance, on ne trouve pas l'inespéré. (Héraclite, Fragment 18). Demeurent ainsi pour le sujet l'espérance et la croyance, ce pari fait sans preuves et même contre les preuves. [...]
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