Si l'existence du mal ne peut être mise en doute, il serait bon de savoir quelle attitude adopter à son égard. Le mal est en général un objet de désapprobation ou de blâme. Nuisible, il peut être physique - c'est-à-dire lié au corps par la douleur, moral - quand il s'agit d'une faute ou d'un péché, métaphysique - quand il concerne l'imperfection et la finitude de l'homme, ou être vu sous l'aspect de l'injustice. On peut considérer l'existence du mal comme le fait qu'il existe en soi, indépendamment de toute expérience, ou qu'il s'actualise dans le réel en tant qu'expérience interne ou externe.
Le scandale quant à lui consiste en une émotion indignée, produite dans le public par des faits ou propos considérés comme contraires aux usages, ou à une morale, qu'elle soit religieuse, athée, ou rationnelle. En tant que remise en cause d'un fait, il implique une rupture et a pour but de changer une situation.
Il ne s'agit donc pas de savoir si l'existence du mal est en soi un bien ou un mal, mais voir si elle remet en cause, après l'avoir examiné, une manière de penser ou un ordre établi. Se pose donc la question de savoir dans quelles conditions une existence peut-elle être un scandale, et sous quel point de vue celle du mal en est un, c'est-à-dire que remet-elle en cause.
Si on considère que l'homme a en lui la possibilité de faire le mal et que l'on envisage l'hypothèse théologique, alors l'existence du mal peut apparaître comme un scandale.
Il en va de même pour le point de vue athée, si l'on considère l'homme comme un être avant tout rationnel et détaché du monde sensible, ce qui lui permet d'acquérir son humanité.
Mais le mal n'existe pas en général, il n'est tel qu'en tant qu'il s'incarne dans le particulier, où il devient difficile de savoir où est réellement le scandale.
[...] Mais comment le couple primordial a il péché s'il l'on ne suppose pas qu'il pèche parce qu'il est déjà mauvais ? Si on admet l'existence d'un principe premier et créateur, à savoir un dieu, l'existence du mal remet en cause ses attributs comme la bonté ou la toute puissance. C'est cette remise en cause qui est un scandale. Selon Leibniz, Dieu ne choisit rien par caprice et comme au sort ou par une indifférence pure. Essais de Théodicée, discours, Pourquoi Dieu veut-il faire souffrir ses créatures s'il est bon ? [...]
[...] Il paraît donc plus pertinent de considérer l'existence du mal dans l'expérience pour déterminer quel serait le critère permettant de savoir si l'existence du mal est ou non un scandale. Le critère semble être celui de l'injustice. Ainsi, il faut pouvoir adopter une distance adéquate pour pouvoir déterminer si l'existence du mal est ou non un scandale. Pour ce faire, il faut d'abord une actualisation du mal, puis il faut trouver un critère qui détermine quelle action a trait à l'existence du mal, celle ci étant posée comme un scandale. Quoi qu'il en soit, l'existence du mal doit être un scandale si on veut pouvoir agir contre elle. [...]
[...] L'existence en tant que telle reste très générale et abstraite, c'est penser sous une catégorie unique une diversité de réalités qui ne sont pas toutes du même ordre. L'existence du mal comme existence en soi n'est donc pas un scandale, c'est plutôt un constat théorique. En tant qu'elle reste du pur domaine de l'esprit et qu'elle n'a aucune indépendance sur le monde, l'existence du mal ne peut pas provoquer un scandale qui est justement une remise en cause de ce même monde. [...]
[...] Il faut trouver un critère pour juger d'une action si elle est ou non un scandale. Il semble que ce qui provoque le scandale, et donc ce qui manifeste le plus l'existence du mal, est l'injustice, c'est-à-dire le déséquilibre entre douleur et faute. La punition, qui pourrait sembler être en soi un mal est unanimement acceptée comme la contrepartie en mal physique d'un mal moral posé comme équivalent. Ce qui provoque le scandale est donc l'absence de relation ou de proportionnalité entre le mal subi et le mal commis même si le premier mal pour l'expérience vécue c'est la souffrance, le vrai mal, le seul mal indéniable, c'est l'injustice. [...]
[...] Le problème du scandale de l'existence du mal semble être résolu puisque Dieu est hors de cause. Mais si Dieu est réellement ce principe premier, il a créé le diable et le mal, donc il est méchant. Ou peut-être ne l'a t-il pas créé, et que le Diable vient du néant, mais dans ce cas Dieu ne serait pas le seul principe créateur, il ne serait plus tout puissant. Même si pour Leibniz le monde est le meilleur possible, chez Dieu l'amour du meilleur dans le tout l'emporte sur toutes les autres inclinations [ ] rien ne pouvant empêcher Dieu de se déclarer pour le meilleur. [...]
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