Dans Les Caves du Vatican, de Gide, Lafcadio prouve l'absolu de sa liberté en précipitant un vieillard d‘un train en marche. Il témoigne de fait de sa capacité à se déterminer en dépit des lois et de la morale. Etre libre, est-ce alors dire non ?
La liberté constitue-t-elle un acte de refus ? L'usage du libre arbitre implique-t-il un rejet systématique ? Peut-on ne définir la liberté que comme une rébellion ? Et si tel est le cas, à quoi faut-il dire non ? L'homme devra-t-il toujours lutter pour sa liberté ? Doit-il se refuser à tout ce qui lui a été donné : sa nature, ou ce qu'il a construit : la société ?
[...] Il convient donc d'examiner la question du désir. Tout d'abord, celui-ci n'est pas un, mais multiple : sitôt satisfait, il se projette vers un autre objet. Le désir n'a pas l'intelligence de sa fin et le désirable ne lui préexiste pas mais est créé par lui. C'est un pendule oscillant infiniment entre la satisfaction et la tension. Vivre selon ses désirs serait maintenant vivre entre deux états, dans l'instabilité et l'insatisfaction. En effet, en désirant quelque chose, je m'engage tout entier dans la satisfaction de ce désir. [...]
[...] Loin de l'exprimer, il fait régresser sa liberté dans un acte déraisonné. Alors, dire non à la loi pour revendiquer sa liberté constituerait un non-sens. L'absolu de l'état de nature n'est plus ici enviable : L'homme est plus libre dans la cité où il vit selon les droits communs que dans la solitude disait Spinoza. Ainsi, nous avons vu que la liberté émergeait de la désobéissance aux lois mais pour ensuite inscrire cette liberté dans la continuité, il fallait non pas se plier aux exigences infinies du désir, mais respecter ce que le sujet définit comme lui-même : c'est-à-dire sa raison. [...]
[...] Spinoza prend l'exemple d'un alcoolique. Captif de ses désirs, il est incapable de s'y opposer mais a paradoxalement l'illusion de choisir de boire ou non. C'est là le pire esclavage : incapable de voir ses fers, il est enchaîné à lui-même et risque de ne jamais pouvoir s'en libérer puisque n'en ayant pas conscience. L'homme captif de son plaisir peut difficilement s'en affranchir. Ce qu'on appelle liberté à ce point est bien plus souvent le signe de l'aliénation au corps et à ses revendications. [...]
[...] Alors, il ne pourrait être libre qu'en étant seul. C'est l'état de nature. La société le confronte à autrui, obligeant la rédaction de lois nécessaires au vivre ensemble. Il parait en effet impensable d'exercer sa liberté au point de tuer un vieillard comme le fait Lafcadio dans Les Caves du Vatican. L'homme doit pouvoir réprimer ses penchants en usant de sa raison qui a intériorisé ce qui se fait ou non. Cependant, autrui n'est pas un obstacle à ma liberté mais en est plutôt la condition. [...]
[...] Un acte sera dit libre si je l'ai réfléchi et si j'en ai la paternité. L'homme est donc entièrement libre s'il peut se déterminer, et ce qui le lui permettra est la raison. Par son caractère d'universalité, elle permet à l'homme d'élaborer et de respecter ses propres actes, singuliers et personnels. Gandhi a été fidèle à sa détermination de lutter pour l'indépendance de l'homme. Il en a assumé les conséquences, passant neuf mois en prison. Puisque capable de décider de ses actes, l'homme est responsable de ce qui le définit alors : la totalité de ses actes. [...]
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