Dans le troisième chapitre de son essai A philosophy of mass art, Noël Carroll analyse le concept d'art de masse pour isoler « les caractéristiques structurelles, fonctionnelles et ontologiques » des œuvres qu'on identifie comme art de masse. Carroll estime que l'art de masse possède un ensemble de caractéristiques qui lui est propre et qu'il cherche à énumérer dans ce chapitre intitulé The nature of mass art. Son argument se développe en quatre parties. Premièrement, il présente et critique la théorie « éliminatrice » de l'art de masse qui nie l'existence de caractéristiques formelles propres à l'art de masse que cette théorie réduit à une construction sociale. Deuxièmement, Carroll propose sa définition de l'art de masse, avec les problèmes qu'elle soulève; et précise certains aspects de sa définition en déterminant le statut ontologique de l'art de masse. Troisièmement, il s'attarde aux objections soulevées par Novitz à l'endroit de sa théorie et critique la théorie concurrente de Novitz. Finalement, Carroll considère l'objection de Fiske, prise pour emblème du courant de pensée des cultural studies, qui rejette la notion de « culture de masse » et préfère employer le concept de « culture populaire », comprise comme lieu de résistance à l'idéologie dominante.
[...] La photographie en tant que forme artistique à instances multiples sera aussi une forme d'art de masse si l'on exclut les Polaroids et les daguerréotypes. La critique de Novitz David Novitz propose cette définition concurrente de l'œuvre d'art de masse : Une œuvre d'art de masse est une œuvre d'art dont la production ou la distribution nécessite l'utilisation d'une technologie de masse dans l'intention de la distribuer au plus grand nombre possible de personnes. (223) Novitz reproche à la théorie de Carroll d'inclure parmi l'ensemble des œuvres d'art de masse des romans du 19e siècle et d'exclure que les beaux-arts (high art) puissent être aussi de l'art de masse. [...]
[...] Pour Carroll, l'art de masse est une sous-catégorie de l'art populaire. Tous les arts de masse appartiennent à l'ensemble anhistorique de l'art populaire, mais tous les arts populaires ne sont pas des arts de masse. Carroll donne l'exemple du vaudeville, qui était à la fin du 19e siècle un art populaire sans être un art de masse, mais qui devient un art populaire et un art de masse lorsqu'il est transposé dans les films de Chaplin. - L'avant-garde et l'art de masse Les défenseurs de l'avant-garde et de l'esthétique moderne (Collingwood, Adorno, Greenberg) ont été les critiques les plus sévères de l'art de masse. [...]
[...] C'est que l'art populaire est un terme anhistorique, tandis que l'art de masse possède une spécificité historique. Selon Carroll, l'art de masse s'est développé dans le contexte de la société industrielle moderne et emploie ses forces de production les technologies de production et de distribution de masse pour rejoindre des populations qui constituent une masse dans la mesure où elles outrepassent les frontières politiques, religieuses, de classe, ethniques et raciales. (185) L'art de masse émerge dans le contexte historique particulier de la société de masse. [...]
[...] Conclusion Carroll croit donc que l'art de masse possède des caractéristiques propres. La catégorie art de masse souligne les caractéristiques structurelles intrinsèques des œuvres d'art de masse. Ces caractéristiques structurelles incluent l'utilisation de technologies de distribution et de production de masse et l'utilisation de procédés formels et/ou stylistiques qui facilitent l'accessibilité de l'œuvre pour le plus large auditoire non formé. L'art de masse se distingue de la catégorie plus vaste d'art populaire par l'utilisation qu'il fait des technologies des médias de masse pour sa production et sa distribution. [...]
[...] Reprochant à Novitz d'entretenir la confusion par un flou conceptuel, il rappelle que l'art d'avant-garde n'est pas la seule forme d'art ésotérique. Il y a aussi ce qu'on pourrait appeler l'art ésotérique traditionnel ou canonique. Cette catégorie de l'art traditionnel ésotérique permet de bien cerner la frontière de l'art de masse parce qu'une partie de l'art canonique qui était inaccessible autrefois est devenue accessible aujourd'hui à force d'éducation populaire. Ainsi, le Middlebrow art serait l'art qui imite les structures de l'art d'avant-garde du passé ou de l'art ésotérique traditionnel. [...]
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