Heidegger écrit dans "Qu'appelle-t-on penser ?" que l'être en soi ne peut être atteint que par la pensée. La science porte sur des objets en général ; la pensée sur des choses singulières. Heidegger affirme que science et philosophie ont des objets et des méthodes différentes et sont hétérogènes : « La science ne pense pas », « [elle] ne se meut pas dans la dimension de la philosophie », « elle calcule ». Il rajoute pour illustrer sa thèse : « la physique se meut dans l'espace et le temps et le mouvement. La science en tant que science ne peut pas décider de ce qu'est le mouvement, l'espace, le temps. »
Heidegger en 1937 réfléchit à la menace qui pèse sur la science. Il pose plusieurs points dont le plus important est la spécificité de la science des temps modernes (par opposition à celle moyenâgeuse ou celle de l'Antiquité) de s'ordonner aux exigences de la méthode, la manière de procéder prend dès lors le pas sur le rapport à la chose même qui est à connaître (l'étant).
[...] La pensée devrait être à la base des sciences, sur leur sol fondamental, mais elle n'a pas le pouvoir de le faire. Or la philosophie en tant que tradition de l'Occident et discipline académique n'a pas donné la preuve qu'elle était capable d'élucider la manière d'être des différents objets de la recherche scientifique. La philosophie a une posture différente des sciences humaines, elle est plus tutélaire ; mais les sciences sont riches de savoir et se sont échappées de la philosophie depuis la Renaissance. [...]
[...] Il y a sans doute des grandes difficultés pour un scientifique à comprendre qu'en philosophie il n'y a pas de vérité, ni de progrès et que le dernier qui a parlé n'a pas nécessairement raison. Aristote écrit : Ainsi donc, si ce fut pour échapper à l'ignorance que les premiers philosophes se livrèrent à la philosophie, il est clair qu'ils poursuivaient la science en vue de connaître et non pour une fin utilitaire. ( ) Il est donc évident que nous n'avons en vue, dans la Philosophie, aucun intérêt étranger. [...]
[...] On constate donc une absence de forces intérieures de la science : elle n'est pas assez consciente d'elle-même, de son essence et de ses limites. La recherche procède avec une assurance somnambulique Elle se caractérise par une absence de volonté pour se rénover de l'intérieur ce qui fait qu'elle est vulnérable à toutes les menaces extérieures : la science n'a pas une conscience de soi qui soit à la hauteur de son essence. D'où peut venir un savoir essentiel sur la science ? [...]
[...] La science ne se pense pas : caractère unilatéral de la science. Heidegger dit que la science ne pense pas car jamais un mathématicien ne pourra exprimer en formule mathématique ce qu'est la mathématique. La biologie ne peut élucider non plus le sens de la vie. Le savoir physique nous éloigne de l'expérience elle-même, de la nature. Il n'y a pas d'auto élucidation de la science ; elle ne peut pas parvenir à une clarté de ses méthodes. Une science est cependant obligée de se remettre en question, de se refonder par un effort de pensée. [...]
[...] La science ne pense pas, elle connaît. La science est affaire d'entendement. Elle produit un savoir. Alors que la pensée est affaire de raison et produit des idées. L'illusion de la science est cependant de croire que seule elle épuise le réel, c'est-à-dire qu'elle dit la vérité de l'être. La science des temps modernes se fonde dans l'essence de la technique : la technique s'impose à l'homme et constitue un danger pour la planète. L'essence de la technique n'a rien d'instrumental, elle est plus qu'un artéfact. [...]
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