Dans ce texte extrait des Pensées, Pascal s'interroge sur la nature du sujet conscient. Il ne
remet pas en cause la conscience de l'existence à proprement parler, qu'il considère comme acquise, mais se propose de définir le moi en posant une question explicite au début du texte : « Qu'est-ce que le moi ? » Il analyse plus particulièrement cette question à travers le thème de l'amour et se demande ainsi s'il est réellement possible d'aimer quelqu'un pour ce qu'il est.
En différenciant le moi, qui apparaît comme une constance à travers les changements, des qualités d'une personne, périssables, il en arrive à affirmer qu'on ne peut réellement aimer une personne et que le moi nous demeure insaisissable.
D'où vient la difficulté de définir le moi selon Pascal ? Comment en arrive-t-il de là à une
vision sceptique de l'amour ?
[...] Il vaudrait mieux parler d'une idée du moi. Pourtant le sentiment de l'identité est bel et bien présent en chacun, c'est-à-dire un sens de l'unité à travers le temps, ce qui fait que nous savons que nous sommes la même personne. La seule chose dont nous pouvons avoir la certitude qu'elle nous est propre est que nous existons, puisque cette existence est confirmée à chaque pulsation de la pensée. La certitude de l'existence est conscience, une conscience réfléchie. En chaque représentation consciente se détache le je qui pense, invariablement le même à travers le temps. [...]
[...] D'où vient la difficulté de définir le moi selon Pascal ? Comment en arrive-t-il de là à une vision sceptique de l'amour ? Pascal commence par annoncer la nature du problème philosophique en posant explicitement la question Qu'est-ce que le moi ? 1. Par une série d'exemples et en procédant négativement par élimination, il tente de proposer une définition de la véritable nature du sujet conscient. Le premier exemple mobilisé par Pascal est celui d'un homme à sa fenêtre observant des passants. [...]
[...] De cette vision sceptique de l'amour, Pascal tire une morale sociale. Puisque la substance, le moi, est inaccessible, nous n'apparaissons jamais tels que nous sommes réellement, même en voulant être le plus honnête et le plus sincère. Ce qui apparaît de nous est la résultante des qualités de notre être, et non pas de notre substance profonde. Ainsi, se faire aimer pour des charges et des offices (l. 17) n'est pas plus condamnable que de se faire aimer pour son jugement ou sa beauté. [...]
[...] Mais le moi substance relève davantage de la perception, une illusion pour affirmer l'unité de l'être dans la continuité. L'identité véritable est portée par la conscience réfléchie, seule véritable unité à travers les changements. Ce que je suis dois alors être pensé selon un rapport un temps, et dire que je ne suis pas mes qualités est faux. Je suis à un instant précis la convergence de toutes mes qualités à cet instant précis. Aimer l'autre est dès lors possible et doit être pensé selon ce rapport au temps. [...]
[...] Pascal répond alors au problème posé en une phrase : On n'aime donc jamais personne, mais seulement des qualités 15) A la question qu'est-ce que le moi ? Pascal ne trouve pas de réponse, sinon que le moi est ce qui fait la particularité chez un individu et qu'il demeure insaisissable. C'est ce caractère inaccessible du moi qui fait dire à Pascal que l'amour véritable est impossible : on ne peut saisir le moi, on ne peut donc aimer le moi. L'amour existe certes, mais ce que l'on aime, ce sont des qualités. C'est sur l'objet de l'amour que Pascal a axé sa réflexion. [...]
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