Traditionnellement, les historiens français désignent sous le terme d'époque moderne, la période qui s'ouvre en 1453 – au moment de la fin de la guerre de Cent ans et de la prise de Constantinople par les Turcs – et s'achève à la RF, date que les historiens fixent pour le début de la période dite contemporaine. En ce sens, la période moderne serait révolue depuis deux siècles. La modernité serait derrière nous, ce que laisse entendre l'expression désormais fréquente de « postmodernité » pour désigner l'époque actuelle puisqu'elle sous-entend que nous nous trouvons « après » la modernité. A cette vision de la modernité comme un moment du passé, on doit opposer l'acception courante de moderne. Dans le langage quotidien, est moderne ce qui est neuf, nouveau, récent. La modernité serait donc le présent, l'actuel . A ce compte, le moderne n'a pas d'épaisseur historique. Il commence à chaque instant et est de ce fait plus tourné vers l'avenir que soucieux de se racines du passé. Enfin, on peut concevoir la modernité – on le fait souvent - , explicitement ou non, comme une période qui commence avec l'ère moderne des historiens et se marque encore dans les attitudes contemporaines. La modernité n'aurait donc pas totalement rompu avec les phénomènes qui ont affecté la période moderne ie l'histoire occidentale depuis la fin du 15ème siècle. Nous serions plutôt dans une phase de transition, encore difficilement lisible, dans l'avènement « d'une époque nouvelle et encore inconnue » : c'est la thèse d'Arendt dans le livre qu'on a justement traduit en français sous le titre de Condition de l'homme moderne.
Arendt déplace les repères : il y aurait deux modernités. Celle de la science qui correspondrait à la mécanique classique (ie la théorie physique de Newton dont les approximations ont été démontrées par la théorie de la relativité d'Einstein). Celle de la politique, dans laquelle nous vivons selon l'expression d'Arendt, serait liée à l'atome et à ses moyens. A ce compte, la modernité c'est la période moderne plus, en bonne partie, la période contemporaine, et il y aurait une modernité politique qui possèderait sa propre temporalité.
[...] La raison scientifique accouche donc de monstres, elle n'est pas forcément une définition concrète du bien pour employer les termes d'A. Touraine. Dans le domaine socio-économique, ce même progrès technique a un dur impact sur la vie des peuples qui vivent les révolutions industrielles Dès le 19ème siècle, on s'aperçoit que l'économie capitaliste ne sert pas seulement à dégager une prospérité générale la richesse des nations comme le voulait le fondateur de l'économie libérale, Smith. Elle est aussi le lieu de la pire des exploitations, celle du prolétariat. [...]
[...] L'individu est par conséquent fortement promu. Il l'est aussi économiquement : la Réforme a été l'occasion, comme le rappelle Arendt, de redistribuer les terres appartenant jusque là aux monastères, favorisant l'apparition d'une bourgeoisie, voire, en Angleterre, d'une noblesse, aux valeurs plus individualistes. Enfin, le troisième trait de l'époque moderne est celui de la rationalisation, de l'avènement d'une nouvelle science et du primat de la raison scientifique. Arendt note que l'invention du télescope fut sans doute le moins remarqué des trois événements qu'elle place aux débuts de la modernité. [...]
[...] C'est la protection des êtres humains qui compte. Par là même, la vision environnementale accepte l'idéologie moderne, centrée sur l'homme. Elle accepte aussi cet autre aspect de la modernité qu'est le développement industriel et technique. Une autre conception des problèmes écologiques présente une vision plus radicale et d'essence révolutionnaire, comme le montre L. Ferry dans Le nouvel ordre écologique. Elle remet en cause le destin moderne dans ses fondements mêmes, et en repoussant l'uniformité propre aux temps modernes rejette les valeurs de cette modernité : primat de l'individu et donc de l'homme, volonté technique et industrielle, idéologie du progrès par la raison. [...]
[...] Cet oubli est-il légitime ? Il est vrai que la modernité en se fondant sur une forme d'humanisme jaloux, rendu surpuissant par la technique, a provoqué une grave rupture. Les problèmes qui sont apparus au 19ème siècle et se sont accrus au 20ème siècle en témoignent : les problèmes dits écologiques. Du problème de l'environnement au problème de l'écologie. Deux mots entrent en concurrence pour qualifier le souci que l'homme prend de la nature : environnement et écologie. Ces deux mots désignent une même prise de conscience de la gravité des dommages causés par l'homme à la nature, mais ils impliquent une vision de ces problèmes radicalement différente. [...]
[...] Cette reconnaissance encore partielle aujourd'hui, n'est devenue que très récemment l'un des lieux communs de la politique internationale. Pendant près de deux siècles, la valeur morale des droits de l'homme quand encore elle était reconnue n'a été guère plus qu'un idéal séduisant, éventuellement mis en pratique dans quelques droits internes mais régulièrement ignoré par les diplomaties, même celles des démocraties. N'a-t-on pas reproché aux accords d'Helsinki de sacrifier à la chimère des droits de l'homme la vigilance vis- à-vis du bloc de l'est, alors puissant et perçu comme une menace ? [...]
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