Don Juan et Figaro sont deux figures culturelles symbolisant le triomphe de la volonté individuelle sur toute forme de pression extérieure.
L'individualisme est une conception politique, sociale et morale qui tend à privilégier les droits, les intérêts et les valeurs de l'individu par rapport à ceux de la communauté. L'homme est supposé libre et doté de droits naturels inaliénables. Cette revendication de la liberté personnelle innée est apparue comme formatrice des sociétés modernes et du modèle démocratique occidentaux. C'est donc à travers un cadre de vie commun que l'individu, plus petit élément d'une société, va chercher à exprimer sa particularité. L'individualisme peut être également considéré en tant que mode de vie encourageant l'initiative individuelle et l'attention à soi, impliquant une recherche exclusive de l'accomplissement de soi. Nous retrouvons ici l'image d'un Don Juan se démarquant des contraintes morales perçues comme des obstacles à on bonheur personnel. Or comment légitimement considérer la priorité d'une volonté particulière sur une autre et comment la concilier avec la volonté générale de la collectivité ? L'idéologie et l'attitude individualistes posent un problème à la fois social, politique et moral. Néanmoins c'est cette vision du monde qui est à la base de la société moderne occidentale : l'affirmation de soi serait le seul critère de qualification des relations interhumaines.
En quoi cette revendication de la liberté personnelle est-elle à la fois un moyen de réaliser la vie commune, mais également une fin en soi, ce qui met à mal la cohésion sociale?
L'attention à soi est une valeur positive, à l'origine de la société libérale et tendant vers le succès personnel.
Or la fin envisagée pose la nécessité d'une négation des contraintes extérieures et sociales, obstacles à l'expansion individualiste.
Dès lors cette concentration sur soi se démarque de l'individualisme en tant que réalisation personnelle.
[...] Nous avons vu en quoi l'individualisme prend pour fondement l'homme en tant que propriétaire de valeurs, objets, idées. Or le détachement de ces propriétés ne permet-il pas de retrouver originalité de l'individu ? Les idées détachées de toute contingence ne permettent-elles pas de définir un bien pour soi et pour les autres ? A un moi défendu dans le cadre de revendications libérales ou anarchiques ne faut-il pas préférer une revendication de soi, en tant qu'être au sein de la collectivité ? [...]
[...] Nous retrouvons ici le libéralisme philosophique des Lumières comme base de l'Etat. Or en quoi consiste ce bonheur ? La tonalité libérale de la Constitution américaine sous-entend par bonheur l'accroissement qualitatif de notre être. Ce progrès s'applique à tout ce que comprend la vie du citoyen, que ce soit la propriété ou la pensée. L'on peut rapprocher cette éthique de la conception utilitariste. Selon John Stuart Mill, toute action doit être efficace, c'est-à-dire effectuée en vue de ce qui est bien pour l'individu. [...]
[...] Il semblerait que cette attitude qualifie le phénomène d'individuation des sociétés, véritable phénomène de masse. L'engouement actuel pour les blogs journaux intimes sur internet, en est l'illustration. Ces créations se veulent affirmation de l'originalité personnelle, néanmoins elles semblent être le fruit d'un effet de mode. Ainsi l'originalité, l'initiative individuelle sont modélisées afin de fournir des définitions, des cadres qui sont actualisées par l'individu en tant qu'entité particulière. Cherchant à échapper à toute définition de l'individu en soi, l'individu réel adopte cependant une attitude partagée collectivement. [...]
[...] Ces pays, tels que la France, connaissent depuis une trentaine d'années un essor de l'attitude individualiste. Or parallèlement, ces Etat ont pu observer un vif détachement des citoyens à l'égard des affaires politiques. Une nette progression de l'abstention électorale illustre ce phénomène. Ceci semble traduire un certain solipsisme, ou du moins le repli de l'individu dans la sphère privée. Cette sphère est bornée donc empêche l'expansion de soi en quoi résiderait le bonheur. Cette sensibilité individualiste qui marque la société actuelle n'est-elle pas en désaccord avec le libéralisme philosophique, qui ne reconnaît aucune limite à la pleine réalisation des libertés acquises et à acquérir ? [...]
[...] Il s'agit en effet d'une synthèse de la multiplicité des situations individuelles. Paradoxalement cette volonté morale de se soustraire à l'influence de la masse se manifeste dans les faits comme un phénomène de masse. N'est-ce pas un instinct grégaire qui provoque le repli sur soi, sur sa vie personnelle et sur ses intérêts? D'après Nietzsche cet instinct pousse l'homme à vivre en société pour assurer sa propre protection. Or ce grégarisme est l'attitude des membres du troupeau qui ne possèdent pas le courage de s'affirmer en tant qu'individus. [...]
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