La Boétie dans son Discours sur la servitude volontaire dit : « je crois, que si nous vivions avec les droits que nous tenons de la nature et d'après les préceptes qu'elle nous enseigne, nous serions naturellement soumis à nos parents, sujets de la raison, sans être esclaves de personne. » il apparait alors comme facile de ne pas être esclave. Seulement, l'Histoire nous décrit un grand nombre de situations où des hommes ont été esclaves et soumis à d'autres. Il apparait alors que la situation d'esclave n'est pas un choix.
De plus la notion d'esclave est polysémique au sens où on peut parler d'un homme privé de sa liberté ou dont celle-ci est entravée, un homme dominé par un maître, soumis à un système. A priori cette notion d'esclave pourrait être définie comme l'absence de liberté et par la domination par autrui. En somme on peut considérer un homme comme esclave à partir du moment où sa liberté d'agir diminue ou est supprimée. Mais comment définir cette notion de liberté ? N'est-ce pas une notion temporelle, qui nécessite un contexte, qui se fonde dans une perspective individuelle ou de groupe ? Ici, nous avons choisi de nous intéresser à l'homme en tant qu'individu et à son état d'esclave en tant qu'être privé de sa pleine liberté d'agir (...)
[...] Mais on peut aussi contester qu'il y ait des hommes faits par nature pour commander ou pour obéir. En effet il se pourrait que l'esclavage ne soit qu'une situation transitoire, résultant d'un rapport de force dans lequel l'esclave a eu le dessous sur le maître. Il s'agirait alors d'une épreuve en droit réversible, de sorte que celui qui a eu le dessous à un moment donné puisse toujours sortir de sa condition d'esclave. C'est en partie la conception d'Hegel dans son ouvrage la Phénoménologie de l'Esprit dans lequel il expose sa dialectique du maître et de l'esclave. [...]
[...] La notion d'esclave peut donc être réactualisée à notre perspective contemporaine. Cependant nous pourrions nous demander si l'homme à sa propre échelle individuelle ne serait pas esclave de son enveloppe charnelle et en somme de sa propre individualité. En effet, pour commencer, nous pouvons qualifier l'homme d'esclave de lui- même dans le sens où il est dépendant de son commencement et de sa finitude : il n'est pas sûr de son origine primaire et ne sait rien de sa fin : il ignore quand sa mort arrivera et surtout ce qu'il y a après, tout résulte dans des convictions. [...]
[...] Ainsi chaque homme est esclave de sa propre individualité et c'est par cette remarque que nous pouvons dépasser la notion même d'esclavage. En effet si le statut d'esclave permettait de qualifier la position d'un homme vis-à-vis d'un autre, le fait que chaque homme le soit à sa propre échelle permet de dépasser la notion même au sens où elle devient inutile pour caractériser le statut d'un homme ; nous pouvons tout de même en mesurer l'importance pour chaque homme. Pour finir l'homme est un être soumis à sa conscience et à sa personnalité. [...]
[...] L'esclave, travaillant, se transforme lui-même et transforme le monde humain à sa façon alors que le maître s'en rend étranger et ne reconnait plus ce qu'en fait l'esclave. Le maître devient alors l'esclave de son esclave. En travaillant l'esclave va acquérir un savoir, une expérience et il sera ainsi capable de dépasser son maître au niveau à la fois intellectuel et pratique. Ainsi, un aliéné physiquement peut être libre spirituellement et vice versa. Un esclave construisant des pyramides durant l'Antiquité par exemple va acquérir un savoir pratique et une facilité à travailler que ne connaitra pas son maître, habitué à se faire servir. [...]
[...] Donc le combat contre l'esclavage se ferait par la raison. Cependant l'homme soumis dans ce cas là ne joue pas un rôle primordial car c'est uniquement l'homme-maître qui doit agir. Nous pourrions alors parler de la passivité de l'état d'esclave, qui serait un autre critère de la définition simple de la notion d'esclave et c'est la conception qu'en a Platon dans son œuvre la Politique où il considère que par nature, certains êtres sont faits pour commander, et d'autres pour obéir. [...]
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