On définit l'homme comme "animal raisonnable" le spécifiant ainsi par la possession de la raison dont il use tant pour connaître que pour se diriger dans l'existence. Or la religion est aussi un caractère spécifique de l'homme. On reconnaît d'ailleurs comme nos ancêtres les premiers hommes qui organisèrent un rituel autour de la mort ; la distinction d'un domaine profane et d'un domaine sacré marque donc, pour nous, l'entrée dans l'humanité (est sacré ce qui est séparé, intouchable, inviolable, qui exige le respect par opposition à ce qui est profane) (...)
[...] * * Les pyrrhoniens sont des sceptiques. Il faut comprendre que si certaines connaissances ne peuvent venir que du cœur, c'est-à-dire qu'elles ne peuvent qu'être accueillies comme vraies et non démontrées, cela n'entache en rien la scientificité des connaissances que nous pourrons former à partir d'elles ; bien au contraire. Notre constitution est ainsi faite que nous ne pouvons tout démontrer ; savoir ceci, c'est éviter de se perdre dans une tentative de démonstration de l'indémontrable. Pascal relie ici foi et savoir sur la base de notre parenté partielle avec Dieu, à la manière de Descartes qui pose le critère de clarté et de distinction comme un critère de certitude, parce que Dieu aurait mis en nous la raison. [...]
[...] Croire et savoir ainsi définis s'opposent donc franchement ; néanmoins, on voit également qu'on ne peut réduire la croyance à la religion. Croire, c'est aussi accorder sa confiance. Dans ses Propos, Alain distingue, au sein de la croyance, la "croyance crédule" qu'il défait comme une "pensée agenouillée et bientôt couchée", de la foi, dans laquelle "il faut croire d'abord, et contre l'apparence ; la foi va devant, la foi est courage" Croire, ce n'est donc pas nécessairement se soumettre, mais c'est aussi prendre des risques. [...]
[...] Mais si croire, c'est avoir foi en quelque chose, et assurer, au-delà de toute justification rationnelle, la certitude de l'incertain, alors peut-être que croire et savoir peuvent aller de pair ; nous savons en effet que la connaissance progresse à condition que l'on anticipe sur ce que l'on ne sait pas encore. Ne peut-on pas alors penser que le développement de la science repose sur une forme de croyance? La confiance que nous devons avoir, tant dans les phénomènes qui se présentent à nous que dans les hypothèses que nous formulons ne relève-l-elle pas de la foi ? Dans quelle mesure le rationnel se définit-il par opposition à l'irrationnel ? [...]
[...] Doit-on alors en conclure que nous ne sommes pas libres, si aucun savoir ne nous l'assure ? Si les deux ordres, celui de la croyance et celui du savoir, peuvent coexister, c'est parce qu'ils sont complémentaires, c'est-à-dire hétérogènes, mais ils ne sont en aucun cas régis par les mêmes règles. Si l'on pense qu'il faut choisir entre croire et savoir, c'est que l'on se représente ce choix comme un dilemme cornélien entre ignorance heureuse et connaissance réaliste ; or, nous avons vu qu'il n'est pas besoin de choisir entre les deux modes de rapports aux objets. [...]
[...] Est-on en effet vraiment honnête lorsque l'on établit une stricte division entre croire et savoir ? N'y a-t-il pas, y compris dons la science, une part irréductible de croyance ? II) Dans tout savoir, il y a une part de croyance : savoir et croyance sont conciliables Le savoir inclut une croyance Nous savons que toute démonstration scientifique repose en dernier lieu sur des indémontrables, propositions évidentes que l'on doit recevoir, accueillir comme vraies. Le scepticisme absolu (position intellectuelle qui remet en doute tout ce qui n'est pas absolument certain) aboutirait donc à une destruction du savoir, puisque tout n'est pas démontrable. [...]
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