On ne peut parler de récit de soi avant que n'apparaisse la réalité de l'individu doté d'une conscience de soi (conscience d'être unique, autonome, séparé des autres). Les sociétés traditionnelles vivent sur un modèle holiste (du grec holos : tout). La communauté l'emporte sur l'individu, qui est pris en charge par son groupe d'appartenance et ne se perçoit que comme membre d'un tout ; il n'y a pas d'espace de choix. Jusqu'au XVIe siècle avec l'humanisme, écrire sur soi n'a pas de sens, ce qui explique le succès des épopées qui sont les histoires des peuples.
[...] Il était membre de l'Oulipo, rassemblement d'écrivains qui veut donner à l'écriture littéraire des contraintes formelles, arbitraires et ludiques Dire l'indicible Les multiples disparitions semblent rendre tout récit impossible, mais Perec va se résoudre à écrire pour sauver du néant ceux qui ont disparu et se sauver lui-même. Ce sont des disparitions qui provoquent des absences radicales. Face au néant, l'auteur constate dans un premier temps qu'il n'a rien à dire : la mort de ses parents est inconcevable et indicible. Une série de morts atroces qui laissent le survivant face à de l'incommunicable, à l'incompréhension, à l'absence. Il n'y a pas de trace de leur mort, presque plus de traces de leur existence. L'absence le confronte à l'impossibilité de dire. [...]
[...] Cette dernière imposture aura été créatrice d'une identité réelle, d'une vocation. Sartre invente un style qui s'identifie à la liberté et à l'imposture. C'est un style d'une grande légèreté, fait de formules brillantes, mais aussi un style qui se met constamment en scène, qui joue, qui veut éblouir et séduire Des mots aux choses Le pacte autobiographique intervient à la fin. Sa formule inaugurale est : Voilà mon commencement C'est l'engagement que prend l'auteur de raconter son histoire, au terme duquel il garantit l'identité auteur/narrateur/personnage. [...]
[...] Cette analogie est avouée dans les derniers chapitres de chacun des récits. Plusieurs éléments de F2 permettent de penser que l'île W est une allégorie du IIIe Reich dominé par un idéal raciste, par le culte du corps et de la force physique et par une conception particulière de la naissance, de la génération et l'enfance. Les allusions sont nombreuses, dès F1 lorsque le narrateur doit rencontrer un allemand pour renouer avec son passé). La fondation de l'île est ramenée à des critères de sélection raciale (provenance occidentale des colons). [...]
[...] Entre les deux parties, les ( ) indiquent un silence, des paroles tues, du non-dit, peut-être la parole des disparus. Cette parole n'est pas là mais a quand même une place. Cela nous renvoie au dispositif narratif où la fiction dit dans l'imaginaire, dans le fantasme, ce que le récit autobiographique ne parvient pas à dire. Quel rapport entre ces 2 strates narratives ? Le récit F1 peut être interprété comme une allégorie de l'enfance naufragée, de l'identité perdue, de la disparition. [...]
[...] Il donne ainsi à ce genre autobiographique une dimension politique. Cependant, ce pacte a des limites : le parasitage des vécus, la présence de la philosophie sartrienne et la volonté d'exemplarité. L'enfant névrosé est toujours présent dans le récit et ne cesse de parasiter le regard lucide de l'adulte : On ne guérit pas de son enfance On se guérit d'une névrose, on ne se guérit pas de soi On entend cet enfant dans le style théâtral, éblouissant, virtuose du récit. [...]
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