Échange, formes d'échanges, interdépendances, limites individuelles, sphères d'appartenance, famille, société civile, dimension transcendante, le lien social
La vie en société implique de multiples formes d'échanges et d'interdépendances, qui nous sont imposés de fait. Ces échanges déterminent des liens, et dans la mesure où ils permettent de surmonter les limites individuelles tout en ayant un caractère contraignant, ils se présentent d'emblée comme ambivalents. Cette ambiguïté fondamentale est inscrite dans la langue : par exemple, le commerce désignait d'abord, dans un sens aujourd'hui désuet, toutes sortes de relations sociales avant d'être nécessairement économiques. Cela veut-il donc dire qu'une logique désintéressée de l'échange soit fatalement rattrapée par des motifs d'ordre économique ? Il convient au premier chef de se demander ce qui définit la variété de ces liens et des échanges qu'ils établissent.
[...] Qu'est-ce qui impose donc une limite morale à la marchandisation des choses, au nom du bien commun et de relations authentiques, et non uniquement perçues sous le prisme de l'argent ? C'est d'abord le rôle joué ultimement par l'état, dont les lois, les institutions, ainsi que l'impôt, contribuent à régler l'économie et la redistribution des richesses. Dans l'état démocratique, lequel se définit idéalement dans la capacité du citoyen à reconnaître sa propre volonté dans la loi qui régit la communauté, s'établit un pouvoir transcendant où se reconstitue la primauté du bien commun. [...]
[...] Les échanges avec autrui redéfinissent en fait les besoins élémentaires en sympathies mais aussi en désirs. Le langage est une des expressions dans la société de cette soif de connaître l'autre, de communiquer avec lui, d'une frustration liée l'objet du désir. Le dialogue est ainsi cette première forme d'échange, qui fonde tous les autres, et qui requiert une forme de concorde pour pouvoir s'établir. S'il peut être houleux, il est en tout cas une forme pacifiée par rapport à l'affrontement physique et aux interactions qui se font conformément à la loi du plus fort. [...]
[...] Les échanges, en tant qu'ils contribuent à créer des désirs et de la frustration, présentent le risque d'accroître artificiellement les désirs de chacun. En donnant l'illusion d'un choix infini, le marché rogne ainsi sur notre liberté, tout en jouant sur un sentiment de frustration perpétuelle afin d'augmenter les profits. L'exemple le plus parlant est celui qui nous est fourni par la société de consommation, fondée sur la loi de l'offre et de la demande, et donc sur la valeur subjective des biens qui nous sont proposés. [...]
[...] Il apparaît alors comme un jeu précaire, opaque, dont certaines règles nous sont cachés et qu'il nous faut découvrir afin de nous choisir des dépendances qui soient les plus libres et les plus conscientes possibles. L'échange est indissociable d'un sentiment d'aliénation, où nous plonge la confrontation avec l'autre et les contraintes imposées par la société, mais nous incite par la même occasion à exercer notre liberté, à décider le plus judicieusement possible de ce qu'il convient de faire et d'aimer. [...]
[...] Cet échange dévoile un caractère non pas fondamentalement désintéressé de l'échange mais immatériel et qui dépasse les simples relations interindividuelles. Au lien affectif qui se noue dans la famille se substitue l'éducation dispensée par la société civile, établie grâce aux legs du passé et qui tire l'individu d'un état égoïste pour en faire un citoyen. C'est grâce à cet échange entre le passé et le présent, entre le maître et l'élève, que l'individu sera en mesure d'acquérir un savoir, un talent, auxquels il pourra faire correspondre une valeur, qui constituera sa contribution à la société. [...]
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