Genet, accusateur public, Discours de l'utilité, Aristote, Racine, Mauriac, dimension cathartique, dramaturge, esthétique de la scène, morale, monde social
Genet oppose la vie à la scène, qui pour lui est « un lieu voisin de la mort où toutes les libertés sont possibles », car les personnages n'ont pas de responsabilité sociale. Genet, lui-même marginal - homosexuel et voleur comme il le dit lui-même –, pense que le théâtre est l'occasion de renverser les règles et les jugements de valeur habituels. Ce qui apparaît comme « abject » dans la vie doit « émerveiller, toujours, étonner, toujours ». Dans cette phrase, Genet rejette la vraie vie, la vie sociale, du côté de l'apparence, elle est figée par une grille de lecture et le rôle du dramaturge est de montrer qu'il existe d'autres interprétations. Au sens faible, le spectateur doit être surpris, voire ébranlé, mais toujours en prenant plaisir. L'étonnement et l'émerveillement du spectateur proviennent de « l'élégance » et de la « force d'évidence » de ce qui lui paraissait abject. Paradoxalement, la surprise vient de la découverte d'une évidence, une façon de voir les comportements qui nous échappait dans la vie.
[...] Littérairement, quoi de plus monotone, de plus court, de plus stérile que le vice ? écrit-il dans le Figaro. Les spectateurs ne sont pas coupés de leur vie quotidienne lorsqu'ils entrent dans un théâtre, ils identifient les comportements abjects joués à leur propre part d'immondice, mais ils prennent plaisir à avoir peur de la condamnation de leurs propres passions coupables et pitié pour ce que les personnages endurent à leur place, même si le spectacle reste à distance. La dimension cathartique limitée ; en effet, le théâtre reste une activité intellectuelle active, les personnages sont des types simplifiés qui font réfléchir à une dimension de ce surmoi même si nous ne le renversons pas. [...]
[...] Les personnages sont parfaitement interchangeables puisque les Martin peuvent reprendre la première scène jouée par les Smith. Les personnages ne remplissent pas les fonctions socialement attendues : le pompier n'a pas d'incendie à éteindre par exemple. Le mari et la femme se reconnaissent au hasard d'une conversation parodiant la scène de reconnaissance aristotélicienne. Les étiquettes sociales attachées aux personnages ne sont qu'un effet de langage, elles ne signifient rien sur le fond des personnages puisque dans cette pièce il est particulièrement visible qu'ils n'en ont pas. [...]
[...] Cette source si noble est son désir de pouvoir, au mépris du bien et du mal. Elle ne donne le trône qu'à son fils qui tue Rodogune malgré son amour. Phèdre dans la pièce de Racine est un personnage noble, descendant de Zeus et du Soleil. Sa grandeur est encore plus étrangère à la vertu que celle des personnages de Corneille, elle est prête à tromper Thésée en commettant un crime considéré comme un inceste. Cependant, à l'inverse de Cléopâtre, Phèdre se repent sur son lit de mort. [...]
[...] La comédie en revanche est autorisée à traiter de sujet plus bas. Les crapules peuvent se substituer aux grands criminels. Molière expose les travers des gens de son époque, mais son théâtre est ambigu, on ne sait pas s'il les condamne vraiment. Dom Juan bien qu'il soit un grand seigneur est un séducteur, libertin et hypocrite. Son seul contrepoint vertueux est Sganarelle, mais il est trop grotesque pour être pris au sérieux. Il est plus le faire-valoir de Dom Juan, le valet maladroit et peureux. [...]
[...] Les conspirateurs ingrats en le tuant tuent le génie, qui paye de sa vie la révélation d'une vérité offerte à ses semblables. Dans Le Théâtre de la cruauté (Le Théâtre et son double), A. Artaud exprime son admiration de la force vive des théâtres occidentaux reprise par Genet dans Les Paravents. La cruauté est pour lui un moyen d'explorer le monde du rêve et de l'inconscient, qu'il découvre avec les surréalistes. La cruauté qu'elle soit physique ou morale au théâtre n'est pas seulement représentée sur scène, elle renvoie à la cruauté que l'homme refoule. [...]
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