dissertation, philosophie, temps, individu, Simondon, Aristote, Locke, temporalité, singularité, individualité, substance, corrigé, processus, devenir, éternité, éternel, humain
Cette dissertation de philosophie traite le sujet "Temps et individu". L'auteur de ce document est normalien et agrégé de philosophie.
Il semble que nous puissions aisément faire la distinction entre ce qui est éternel - par exemple, les lois de l‘arithmétique ou de la logique - et ce qui est fugace : une sensation, un événement. Entre les deux viennent prendre place l‘ensemble des objets qui peuplent notre monde, et parmi eux, ceux que nous désignons sous le terme « d‘individu ».
Un « individu » c‘est avant tout un objet que nous désignons et que nous séparons des autres ; concrètement, il peut s‘agir d‘une pierre, d‘un cheval, du soleil ou d‘un homme. Mais tous ont en commun d‘être à la fois pris dans le flux du temps, et d‘en échapper en quelque sorte. Car tous ces objets finiront par disparaître, par se désagréger ; mais il semble que cette dissolution soit mise en suspens pendant un certain temps (variable) qui fait que nous pouvons, à l‘inverse des événements, les reconnaître comme des êtres relativement stables, dotés d‘une certaine permanence. L‘individu est donc ce qui subit le passage du temps tout en y échappant.
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[...] Il nous faut comprendre l'origine des singularités individuelles. Si l'on pose que la version contemporaine de la forme de l'individu est l'ADN, alors on s'aperçoit que cette notion d'ADN permet de comprendre ces singularités. D'abord à travers l'histoire des espèces : les espèces se distinguent entre elles au cours d'une histoire, faite de mutations et de sélections naturelles (Darwin, L'origine des espèces). Certaines singularités intra- spécifiques se comprennent aussi dans l'ADN : c'est elle qui fait que nous naissons différents, d'emblée. [...]
[...] De manière contemporaine, pour les individus biologiques, l'ADN. Connaître un individu, c'est alors connaître son génome. Transition : Mais un individu biologique ne se distingue pas seulement par sa forme (qui échappe au temps). Un individu est aussi ce qui se différencie de tous les autres individus ; il est une singularité : tel cheval n'est pas tel autre. Cette singularité, se déploie-t-elle dans, ou hors du temps ? Ce qui distingue l'individu des non-individus doit donc, d'une certaine manière, résider hors du temps afin de fournir un socle à la continuité (continuité de vie dans le cas de l'individu vivant). [...]
[...] Enfin, les individus vivants trouvent leur unité dans une continuité de vie : de la matière peut s'ajouter/se retrancher, un être vivant reste le même lorsqu'il découle de la même vie. Donc, un individu physique est ce qui résiste au temps, ce qui ne change pas (hormis dans l'espace malgré le temps). Pour l'individu physique, le temps est une épreuve : c'est le passage du temps qui, en laissant les atomes et certains groupes d'atomes inchangés, désigne l'individu. A l'inverse, un individu vivant change, et se déploie. Un chêne qui grandit reste le même arbre, un seul individu. [...]
[...] Si l'individualité de l'individu biologique, ce qui permet de le distinguer des non-individus, semble résider dans une continuité (la forme spécifiée en ADN) qui ne fait que se déployer dans le temps tout en demeurant inchangée, la singularité de celui-ci ne peut se comprendre que comme construction dans le temps. Connaître un individu, ce n'est pas seulement saisir son essence, c'est aussi retracer son histoire : histoire spécifique (sélection naturelle), histoire individuelle (épigenèse, trajectoire sociologique, fixations libidinales), histoire personnelle (existence telle qu'elle est construite et vécue dans le rapport à soi : autobiographie). Transition : Il semble que le temps soit jusqu'alors pensé comme extérieur à l'individu. Soit qu'il soit son lieu de déploiement, lorsque l'on considère l'individualité de l'individu, c'est-à-dire ce qui le distingue des non- individus. [...]
[...] Certaines théories biologiques contemporaines semblent d'ailleurs avaliser cette conceptualité : J.J. Kupiec (L'origine des individus), en se basant sur la découverte de la non-stéréospécificité des molécules codantes de l'ADN, montre ainsi que l'on ne peut réduire la formation de l'individu à l'instanciation d'une forme comprise comme code génétique. L'individu ne se crée qu'au cours de micro-processus buissonnants qui peuvent s'apparenter à des résolutions de problème. L'ordre ne se crée pas par l'imposition d'une forme intelligible, mais par un phénomène de sélection naturelle intra-organique : les processus les plus performants subsistent, demeurent, prennent le pas sur les autres, et ainsi se forment les individus. [...]
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