Auteur de la première doctrine du monde des idées intelligibles qu'ait connu l'histoire de la pensée humaine, doctrine d'un monde différent du monde sensible, Platon fut aussi sans doute le premier à avoir opposé sans ambiguïté le temps à l'éternité extra-temporelle. Plus exactement, il les a non pas « opposés », mais « confrontés », vu que le temps chez lui est un semblant d'éternité dans le monde empirique du devenir, et, partant, ne se distingue pas seulement de l'éternité, mais lui ressemble aussi. Il faut toutefois noter que Platon a désigné le concept « éternité » alors que les présocratiques avant lui l'utilisaient pour désigner « la durée de vie illimitée » avant tout de la vie du cosmos. Chez Platon, les concepts d'"éternité" et du "temps" se distinguent déjà strictement, bien qu'il n'y ait toujours pas encore d'usage terminologique platonicien de ces mots du langage vivant : celui-ci est apparu plus tard. Pour désigner l'être intelligible éternel, Platon emploie aussi un autre mot, aidion, formé de même qu'aion, à partir de l'adverbe aéi (toujours). Aion et aidion sont employés par Platon comme synonymes désignant l'être étant éternellement à la différence du devenir temporaire ...
[...] Le Concept de Temps de l'Antiquité au Christianisme (Aristote, Plotin, Augustin) Par Rosan RAUZDUEL Université des Antilles et de la Guyane On ne trouvera guère de philosophe qui n'ait tenté de répondre à la question: qu'est-ce que le temps? Et il est rare qu'un philosophe ne témoigne pas de la complexité de ce problème. On connaît les paroles célèbres d'Augustin sur l'étonnante nature du temps: «Qu'est-ce en effet que le temps? si personne ne me le demande, je le sais; mais si on me le demande et que je veuille l'expliquer, je ne le sais plus» 14J)[1]. [...]
[...] Fait caractéristique, après avoir renoncé à définir le temps au moyen de l'éternité, Aristote ne fait plus appel aux expressions dont se servait Platon. Ainsi, quand il parle des choses qui existent hors du temps (par exemple, des vérités mathématiques ou logiques qui conservent leur valeur indépendamment du temps), mais éternellement, Aristote n'emploie nulle part le mot Aion, mais préfère le mot aéi (toujours) (Phys., IV, 12). Ce que nous pouvons traduire comme «l'existant éternellement» est désigné par Aristote comme «l'étant toujours» (Phys., IV a7). [...]
[...] C'est un tournant d'une importance énorme pour l'évolution de la culture européenne. C'est justement la tendance, liée au christianisme, à surmonter le cosmisme païen, tendance suscitée par le désir d'entendre Dieu en tant que principe supra-cosmique personnel, qui a entraîné une réinterprétation jusqu'à la conception antique du temps. En liant le temps à la vie précisément de l'âme humaine, Augustin crée la condition d'une interprétation du temps qui, plus tard, plus de mille ans après, a reçu le nom de transcendentalisme, chez Kant, Fichte, chez Brentano et Hüsserl et, enfin, chez Heidegger dans son ouvrage L être et le temps. [...]
[...] Et qu'est-ce que la mémoire? Selon Augustin, ce n'est plus un élément du monde naturel extérieur, mais un élément pur, l'élément de l'âme elle-même. «C'est en toi, conclut Augustin, mon esprit, que je mesure le temps»[16] (16). Le raisonnement d'Augustin est facile à comprendre: si, pour Plotin, pour qui le temps est la vie de l'âme du monde, la mesure du temps c'est toujours, comme chez ses prédécesseurs, la rotation du ciel, car le ciel le cosmos est le corps de l'âme du monde, Augustin, lui, qui n'admet pas l'existence d'une âme cosmique, doit trouver une mesure du temps et le moyen de la mesurer dans l'âme humaine elle-même. [...]
[...] Pour désigner l'être intelligible éternel, Platon emploie aussi un autre mot, aidion, formé de même qu' aion, à partir de l'adverbe aéi (toujours). Aion et aidion sont employés par Platon comme synonymes désignant l'être étant éternellement à la différence du devenir temporaire[3]. Concevant ainsi le temps comme corrélat de l'éternité, Platon le définit comme une catégorie cosmique: il est créé en même temps que le cosmos, il nous apparaît dans le mouvement des astres et il obéit à la loi du nombre. [...]
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