Les animaux n'ont pas besoin de travailler. Ils peuvent subvenir à leurs besoins sans cela. L'homme, quant à lui, semble être cet animal contraint de travailler pour, simplement, satisfaire ses besoins alimentaires : se nourrir, se loger...
Ce que l'homme perd en travaillant, c'est sa liberté, au sens de liberté « naturelle » ou liberté de mouvement : il faut se rendre au travail à heures fixes, dans des lieux imposés.
Les « travaux forcés » ne désignent alors pas cette punition infligée aux délinquants, mais bien le travail accompli par tous les hommes. Certes, le travail nous apporte quand même quelque chose, un salaire par exemple, mais ce dernier n'a pas de valeur en soi. Il est simplement un moyen d'acquérir quelque chose. Pour obtenir ce salaire, les hommes perdent leur énergie, leur disponibilité, parfois même leur santé, comme lorsque le travail est caractérisé par sa grande pénibilité (travail à la chaîne, dans les mines, etc.).
[...] Malgré la contrainte, c'est le travail qui libère l'esclave. Nous gagnons à travailler cette liberté qui réside selon Hegel dans l'objectivation de notre valeur subjective. Hegel nous explique qu'il y a au fond de l'homme une inquiétude existentielle, un doute quant à sa valeur inséparable d'une peur de la mort, d'être réduit à rien, de ne plus rien valoir. Aussi le travail de l'esclave, en lui apportant une relation à la nature et la reconnaissance de sa valeur, lui permet-il de dissiper son angoisse existentielle. Le temps, l'énergie, la disponibilité perdus, le sont alors en échange d'une reconnaissance qui est, selon Hegel, ce que les hommes désirent le plus profondément. Peut être avons-nous d'autres désirs que le travail empêche de satisfaire, mais il nous permet de satisfaire notre désir le plus profond. Ce que nous gagnons à travailler, c'est peut être même le bonheur, défini avec Hegel dans sa relation au le désir de reconnaissance de soi. C'est bien ici l'action qui se retrouve revalorisée (...)
[...] Que gagnons-nous à travailler ? Introduction : Le travail est-il cette activité par laquelle nous actualisons notre humanité, ou au contraire cette activité qui nous déshumanise ? Ne pas perdre sa vie à la gagner ! Ce slogan de Mai 1968 suggère déjà que le travail, manuel ou intellectuel, salarié ou non, par lequel on gagne sa vie puisse s'accompagner d'une perte de quelque chose d'essentielle. D'ailleurs, tout un champ lexical, du travail à la chaine aux travaux forcés confirme cette résonnance négative du terme travail. [...]
[...] Un tel propos peut résonner de la référence à la déshumanisation occasionnée par un certain type de travail, au sein duquel l'homme est réduit à une machine, répétant les mêmes gestes dans un automatisme qui rend impossible le développement de ses facultés humaines. En plus de rien nous apporter, le travail risque alors de nous faire perdre notre humanité. Une telle déshumanisation est d'autant plus grave que notre humanité aspire justement à se développer au contact d'une activité. Les camps de travail ont souvent visé, justement, dans l'Histoire, soit la punition des hommes, soit leur déshumanisation. [...]
[...] Conclusion : Le travail est cette contrainte, parfois pénible grâce à laquelle nous gagnons et développons notre humanité Si le travail est parfois déshumanisant, il peut être présenté comme une activité favorisant l'actualisation de notre humanité, et ceci en deux sens. D'une part, il nous insère dans une société structurée au cœur de laquelle nous pouvons rencontrer les autres et obtenir la reconnaissance objective. D'autre part il nous permet de développer notre humanité au sens de nos facultés ou potentialités proprement humaines. Il est vrai que les animaux n'ont pas à travailler. Mais c'est justement ce qui leur manque. [...]
[...] 3ème Partie : Le travail apporte subjectivement à l'homme la joie de se développer au contact d'une activité Le travail peut être présenté comme une façon de travailler sa propre individualité, ses facultés humaines. On peut penser en effet que la plupart de nos qualités sont présente en nous en puissance comme des potentialités à se développer. Aristote oppose ce qui est en puissance à ce qui est en acte effectif, réel. Pour passer de ce qui est en puissance à ce qui est en acte faut des occasions. [...]
[...] Le travail nous permet de nous réaliser. Certes, il est une contrainte, mais c'est justement par la contrainte et l'effort que nous progressons. Le travail intellectuel (rédiger une copie de philosophie), manuel (fabriquer un meuble) ou encore salarié (le travail d'un cadre) est alors l'occasion de sortir de sa subjectivité, et d'entrer dans le monde de l'objectivité. C'est là l'enseignement essentiel de la Dialectique du maître et de l'esclave que l'on trouve dans la Phénoménologie de l'Esprit de Hegel. Dans cette parabole, le maître est finalement représenté comme moins libre que les esclaves. [...]
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