L'opinion publique peut-elle légitimement fixer des normes sociologiques ou même légiférer ? A quelles conditions est-ce réalisable dans les faits ? Les lois ne risqueraient-elles pas de n'être que le fruit de surgissements spontanés d'idées ? Quelles sont les limites aux capacités de l'opinion ?
[...] Platon le reconnaît lui-même, on peut donc assigner deux critiques à cette théorie des philosophes-roi : d'une part, l'autoritarisme des détenteurs de la " Science du pouvoir " (que pourrait bien être une telle science et d'autre part à partir de ce point de vue, on rejète l'opinion en lui refusant la possibilité de vouloir la loi. Comment éviter d'imposer des lois à l'opinion ? Contre Platon, on peut penser avec Rousseau que la volonté de la loi a le primat sur son élaboration. [...]
[...] Quelle doit être la fonction de l'intellectuel ? Au début du siècle, Barrès fustigeait les intellectuels en les qualifiant " d'aristocrates de la pensée, d'oligarchie immorale et vaniteuse, prétentieuse et grotesque de gradés, de diplômés, d'agrégés, de docteurs qui cherchent à afficher qu'elle ne pense pas comme la vile foule. " Il souligne par ses mots polémiques que l'intellectuel n'est qu'un membre à part entière de l'opinion dont le jugement n'a pas plus de " valeur " que n'importe quel autre citoyen. [...]
[...] Mais la relation aux médias est double : s'il est vrai qu'ils jouent subtilement un rôle dans le conditionnement de l'opinion c'est ainsi qu'on laisse miroiter un semblant de choix concernant la mode qui est en fait imposé par les puissants. En retour, par l'exercice d'un " chantage à l'audimat " l'opinion contraint les media à diffuser ce qu'elle a envie de visualiser. " La démocratie est le meilleur régime à condition que le peuple soit éduqué " disait Socrate ; le peuple doit faire preuve de ce que Montesquieu appellera dans l'Esprit des Lois la vertu politique c'est à dire approximativement le civisme ; une responsabilité des citoyens envers la loi dont ils sont les auteurs et les sujets. [...]
[...] L'opinion peut-elle faire la loi ? Dans les Essais (1580-1595), Montaigne désigne l'origine des lois naturelles : la coutume : " chacun ayant en vénération interne les opinions et mœurs approuvées et reçues autour de lui Il pose en ces termes le problème du fondement de la morale. Si la conscience ne fait qu'intérioriser des opinions et des mœurs, tous nos jugements de valeurs s'expliquent par des causes sociologiques, historiques La vérité une et absolue s'évanouit et il n'y a plus que des opinions relatives. [...]
[...] Il s'agit à partir de là de se faire avec les autres. L'opinion crée la normalité par la force du nombre, de la tradition ou de l'autorité et c'est à l'individu de s'y insérer. Dès le XVIIe siècle, Fontenelle et Pierre Bayle démontraient l'insuffisance de ces trois pseudo arguments : Pierre Bayle critique en particuliers les " superstitions " liées aux comètes. Il est ainsi absolument illégitime que l'opinion se mêle d'établir des lois à prétention scientifique. Au XIXe siècle, le problème demeure puisqu'en 1881 Michelson s'interroge sur un postulat fondamental de la physique newtonienne : l'hypothèse de l'espace absolu. [...]
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