Cette année, diverses manifestations ont marqué le 60e anniversaire de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz, où moururent une très grande partie des quelque six millions de Juifs européens. Rappel nécessaire d'une énorme tragédie qu'on aurait pu éviter. Mais c'est depuis de nombreuses années que l'injonction au " devoir de mémoire " est récurrente et s'accompagne d'une multiplication des commémorations, qu'elles émanent des pouvoirs publics ou des associations qui portent les mémoires. Le plus souvent il s'agit de mémoires douloureuses et traumatisées : celle de la Seconde Guerre mondiale, de l'Occupation, de la déportation, de la Résistance et de ses combats, de la Shoah, les mémoires multiples de la guerre d'Algérie, celle du génocide arménien, etc ...
[...] Tiphaine du Cauzé de Nazelle 3è Année de Sciences Po Bordeaux Trinity College Dublin "Il se pourrait même que le devoir de mémoire constitue à la fois le comble du bon usage et celui de l'abus dans l'exercice de la mémoire". (Paul Ricoeur "la mémoire, l'histoire, l'oubli") Cette année, diverses manifestations ont marqué le 60e anniversaire de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz, où moururent une très grande partie des quelque six millions de Juifs européens. Rappel nécessaire d'une énorme tragédie qu'on aurait pu éviter. [...]
[...] C'est pourquoi Paul Ricoeur, notamment préfère parler de 'travail de mémoire' plutôt que de 'devoir de mémoire'. Ainsi, la détermination éthique aurait tendance à s'intégrer à l'histoire en train de se faire. Et, du même coup, elle acquerrait une portée directement politique. Seul le travail de mémoire complété par celui du deuil serait capable de préserver la fragile frontière entre amnistie et amnésie. Pour Paul Ricœur, la tradition judéo-chrétienne du " souviens-toi " fait du devoir de mémoire un devoir de rendre justice par le souvenir à un autre que soi, elle introduit l'idée de dette et de reconnaissance envers les générations passées et les morts. [...]
[...] Un devoir de mémoire s'impose à nous tous. Que ce devoir de mémoire nous permette d'éviter les erreurs commises dans le passé, nous rende vigilants jamais complices devant les erreurs qui se commettent maintenant. Que ce même devoir nous incite à les dénoncer et à les combattre. La justification ultime du devoir de mémoire est la justice rendue aux victimes, pour leur propre apaisement, justice qu'une histoire des vainqueurs risque d'oublier. Mais il ne faut pas que ce désir de justice entretiennt un ressentiment, comme nous le verrons plus tard. [...]
[...] Au nom du devoir de mémoire des abus dans l'exercice de la mémoire permettent le ressentiment, ainsi qu'une instrumentalisation de l'histoire Pour Ricoeur, s'il y a des risques dans la frénésie commémorative, il y en a tout autant dans la mémoire et ses abus : "Les sociétés souffrent d'une maladie du souvenir dont les symptômes sont visibles : l'impossibilité de faire la paix dans plusieurs régions du monde, des terres gorgées, accablées de mémoire. Les peuples ne se pardonnent pas. [...]
[...] Ainsi, on ne rencontre pas de politique de mémoire par exemple dans les DOM-TOM, où une mémoire régional surgit. L'Etat ne met pas en place une politique qui remémore la question de l'esclavage. C'est un enjeu à moyen terme qui va rebondir avec la montée de l'enseignement du fait religieux et des langues régionales L'oubli pour renforcer le consensus national ou permettre une construction identitaire voir favoriser un communautarisme Par exemple, aux lendemains de la seconde guerre mondiale, l'oubli de moments douloureux mettant en question l'unité de la nation (et la nécessité d'une reconstruction nationale) a été légiféré. [...]
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