La dernière loi sur la laïcité votée par le parlement français à une écrasante majorité en 2004 a provoqué dans les pays étrangers perplexité et indignation. Cette émotion témoigne d'une réelle originalité française. Le mot "laïcité" n'a guère d'équivalent en d'autres langues, si ce n'est en espagnol ou en turc depuis l'adoption par Atatürk du modèle français dans les années 1920, l'anglais ne connaît que le terme "secularity". Cette exception française est le fruit d'une longue histoire qui remonte bien avant l'apparition du mot "laïcité" dans les dictionnaires en 1871. C'est au siècle des lumières que l'on doit chercher les origines du principe républicain de laïcité. En effet, cette conception politique s'inscrit bien dans un contenu émancipateur et libéral, l'état, qui doit veiller à l'égalité et à la liberté de ses citoyens, ne privilégie aucune confession et assure la libre expression de chacun. Cette lutte pour la laïcité, initiée par les philosophes des lumières, aboutira en 1905 à la séparation stricte de l'état et des confessions. Cette séparation, caractéristique de l'état français, reflète un certain anticléricalisme et témoigne d'une certaine hostilité à l'Eglise et à la religion. En effet, si la plupart des pays démocratiques respectent la liberté de conscience et la non-discrimination religieuse, ils n'appliquent pas de séparation stricte. De plus, avec l'arrivée de l'islam, cette conception républicaine de la laïcité est de plus en plus remise en question. Pourquoi une telle séparation fut-elle nécessaire en France? Cette séparation est-elle compatible avec le respect des libertés et des différences? Une laïcité plus souple est-elle envisageable?
Pour répondre à ces questions, nous nous intéresserons d'abord à la laïcité républicaine, une laïcité dite de combat, avant d'aborder des formes de laïcité plus souples et plus ouvertes.
[...] En France, les défenseurs de la laïcité se divisèrent alors entre partisans d'une séparation stricte, reléguant toute pratique religieuse à la sphère privée, et partisans d'une laïcité plus souple, laïcité-neutralité assurant d'abord le respect des différences. Le débat se cristallisa également autour de la question de l'enseignement. En 1984, le projet d'Alain Savary qui prévoyait l'unification de l'école publique et privée en un service public et laïc suscita les plus grandes manifestations du septennat Mitterrand. Les défenseurs de l'école privée y virent une atteinte directe à leur liberté. L'Eglise, qui avait fait le deuil du 19ème siècle et accepté le principe de séparation, affirma son intransigeance envers une "loi d'oppression" et condamna la "laïcisation" française. [...]
[...] Plutôt que d'exclure totalement la religion, ces pays ont fait le pari de mieux la connaître. Il me semble difficile en France, où toute allocution religieuse à l'école est très mal vue, d'appréhender la société musulmane sans connaître les valeurs de l'islam. A ce sujet, Françoise Champion distingue deux logiques caractérisant les rapports entre l'état et les confessions: l'une dite de laïcisation caractérise essentiellement les pays catholiques qui, comme la France, ont du lutter contre une Eglise conservatrice incarnant un véritable pouvoir politique et social; l'autre dite de sécularisation fait référence notamment aux pays protestants, où la société et l'Eglise se sont libéralisées en même temps, évitant par là tout conflit nécessitant une nette séparation. [...]
[...] Le manque de culture et l'endoctrinement mené par les prêtres font des enfants et des âmes simples des proies faciles. Débute alors une bataille pour l'enseignement entre l'Eglise et les républicains D'après Voltaire, seul l'état en se renforçant peut lutter contre l'aliénation religieuse et ainsi assurer la paix civile et religieuse. Les religions doivent se soumettre au contrôle politique d'un état central fort. Le but de la constitution civile du clergé de 1791, qui fait des prêtres des fonctionnaires rémunérés par l'état, sera donc de rationaliser l'Eglise et d'exercer sur cette dernière un contrôle permanent. [...]
[...] Qui n'est pas libre ne peut former des citoyens libres. L'Etat a le devoir de préserver la jeunesse de leur influence." En 1905, suite à l'affaire Dreyfus, la séparation semble inévitable. C'est le gouvernement d'Emiles Combes qui la mettra en place. La loi assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et affirme la stricte neutralité confessionnelle de l'état, "l'état ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte."A partir de cette date, les confessions sont reléguées à la sphère privée et l'Eglise est écartée du pouvoir. [...]
[...] Tocqueville, dans "de la démocratie en Amérique" explique ceci par le fait que les Eglises n'ayant jamais été associées au pouvoir politique, elles ne pouvaient bénéficier du discrédit porté à l'Eglise catholique en France par exemple. Aux Etats-Unis, les Eglises ont joué le jeu du républicanisme, du suffrage populaire et du constitutionnalisme, ainsi la séparation de l'Eglise et de l'Etat n'a pas été vécue comme un conflit. Si les références à Dieu peuvent choquer à l'étranger, elles sont parfaitement acceptées par la population américaine qui est très majoritairement religieuse, bien que la pratique décline, il est mal vue aux USA de ne pas avoir de religion. [...]
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