L'interrogation de la conférence d'André Comte-Sponville est une question au cœur de sa philosophie morale, et qui met en question la légitimité de son projet tout entier : peut-on tenir une philosophie morale relativiste sans tendre vers le nihilisme, sans tomber dans les travers de celui-ci et donc sans renoncer à toute morale ? Il fixe une distinction claire dès le début : le relativiste détermine des valeurs, qu'il juge relatives à sa propre personne, sans se référer à des normes extérieures que tout le monde devrait reconnaître alors que le nihiliste nie toute valeur, et souvent du fait même que les valeurs ne sont après tout que relatives.
De prime abord, il s'agit bien là de deux positions tout à fait différentes, qui s'affrontent justement sur la question principale : la reconnaissance ou non par l'être humain de valeurs et surtout l'existence d'un fondement de ces valeurs. Et pourtant, l'une semble comme contaminer l'autre. André Comte-Sponville a tout d'abord examiné l'accusation de nihilisme dont est toujours victime le relativisme moral de nos jours. Il rappelle ainsi un changement assez surprenant : dans l'histoire, nous sommes passés de l'évidence que devait constituer le relativisme moral (qui est l'œuvre d'après lui de Lévi-Strauss, de Foucault, d'Althusser) à sa mise en accusation, à de lourds soupçons à son égard. Le terme lui-même de relativisme est devenu un terme péjoratif. Pourquoi ? Justement par la tendance que l'on a cru déceler du relativisme à mener au nihilisme. Une telle thèse sur le relativisme s'appuie sur un argument majeur, qui peut se résumer sous cette forme très simple : « tout se vaut, donc rien ne vaut ».
Il s'agit donc d'évaluer les arguments apportés par les relativistes – défendus ici par Comte Sponville – pour se défaire de cette accusation assez lourde. Et peut-être, en dernière analyse, de se demander pourquoi il faudrait se défendre par principe de tout nihilisme. Qu'est-ce que le relativiste fuit exactement, qui soit présent chez le nihilisme : le nihilisme conduirait à l'impossibilité du discours ? justifierait tous les abus et dérives ? ne permettrait aucun jugement du comportement ?
La conférence d'André Comte-Sponville s'est ainsi déroulé en deux parties : la première devant fournir les raisons pour lesquelles le choix du relativisme moral s'impose, la deuxième devant expliquer les différences qui sont maintenues avec le nihilisme moral et qui lavent le relativisme de ce soupçon. Le relativisme peut-il vraiment constituer cette voie médiane de la morale, comme cherche à l'établir André Comte-Sponville ?
[...] Il est donc impossible d'établir une morale scientifique ou vraie. Entre le point de vue de l'action et celui de la connaissance, il y aura donc toujours une dualité irréductible. Cette différence semblerait pouvoir indiquer que les valeurs ne peuvent pas être objectivement déterminées et qu'elles résultent au contraire des conditions de leur apparition, qu'elles sont relatives. l'argument spinoziste ou darwinien Nous sommes des êtres de désir, qui se porte sur un objet en particulier et détermine par après la valeur que nous croyons découvrir en lui. [...]
[...] Or un relativisme rapporté à l'échelle de l'humanité tout entière, devient le parfait équivalent de l'absolutisme, puisque l'humanité est l'absolu. Pour André Comte-Sponville cependant, c'est bien aux individus qu'elle reste relative. Le nihilisme est démobilisateur, ce qui n'est pas le cas du relativisme. Rien ne peut dispenser de l'action morale, voilà plutôt la conséquence d'un relativisme : la morale ne peut être fondée sur rien, pas même sur la logique, il faut donc choisir sa morale, et la mettre en pratique. Le relativisme ne mène donc en rien à un renoncement à la civilisation. [...]
[...] Et pourtant, l'une semble comme contaminer l'autre. André Comte-Sponville a tout d'abord examiné l'accusation de nihilisme dont est toujours victime le relativisme moral de nos jours. Il rappelle ainsi un changement assez surprenant : dans l'histoire, nous sommes passés de l'évidence que devait constituer le relativisme moral (qui est l'œuvre d'après lui de Lévi-Strauss, de Foucault, d'Althusser) à sa mise en accusation, à de lourds soupçons à son égard. Le terme lui-même de relativisme est devenu un terme péjoratif. Pourquoi ? [...]
[...] C'est ce qu'il désigne du nom de cercle normatif, même si cette fidélité peut être, bien évidemment, critique et plurielle. Elle ne mène pas nécessairement à des valeurs égoïstes, mais ce cercle normatif est aussi ce qui explique le caractère fragile de la morale relativiste, qu'accepte tout à fait Comte- Sponville : par son absence même de fondement, c'est une morale de l'incertitude mais cette caractéristique ne saurait constituer en elle-même une objection au relativisme. Le relativisme, même si menacé, n'est pourtant pas condamné à se résoudre en nihilisme démobilisateur. [...]
[...] Paradoxalement, la reconnaissance par tous de la valeur de l'égalité entraîne une adhésion au relativisme de toute valeur. On voit que l'on peut contester également cet argument par une sorte d'analyse sociologique, tout comme par la remise en cause du lien nécessaire entre mœurs et morale. l'argument épicurien Celui-ci se fonde, explicitement, sur une vision matérialiste du monde, qui refuse tout idéal délivré par une transcendance. S'il n'y a pas d'idéal, il n'y a donc pas de valeurs comme la justice en soi, ce qui implique que telle justice ne vaille que dans certains groupes, certaines communautés. [...]
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