Flaubert disait de la religion qu'elle est nécessaire pour le peuple. Cependant, il ajoutait :
« Pas trop n'en faut ». Peut-être est-ce là un bon moyen d'aborder le sujet proposé, puisque
devant les dérives du monde contemporain, l'appel à la religion se fait de plus en plus fréquent,
de plus en plus pressant, au risque d'être abusif. En effet, la religion, qui a été nécessaire aux
civilisations, tant pour leur fondation que pour leur pérennité, est aujourd'hui encore ancrée dans
la manière d'être et de penser de l'humanité, pour son plus grand bien le plus souvent. Toutefois,
il arrive régulièrement que la religion soit en quelques sortes un « bouc émissaire », prétexte
invoqué à chaque insuffisance des arguments « humains », pour justifier des comportements que,
paradoxalement, le dogme en cause est loin de prescrire et d'approuver.
[...] Il semble ainsi opportun d'étudier le vers de Saint-John Perse au regard des autres conceptions religieuses avant d'apprécier la conception qu'il propose pour elle-même (II). I Dieu l'épars nous rejoint dans la diversité : le panthéisme de SaintJohn Perse opposé aux autres conceptions religieuses Toute religion se définit comme une croyance c'est à dire comme un assentiment à des affirmations dont la démonstration est insuffisante ou dont les fondements sont inconnus. En n'excluant pas le doute, la croyance s'oppose au savoir démontré. [...]
[...] On parle même de foi en matière de religions, mais alors la question de l'insuffisance des preuves ne se pose pas. La connaissance intuitive qu'a l'humanité de Dieu a toujours permis de rassurer les Hommes, de leur expliquer par l'improuvable ce qu'ils ne comprennent pas, qui échappe à leur contrôle et qu'ils craignent. Ainsi les Egyptiens ont-ils fait un Dieu du soleil, qu'ils ne voyaient pas comme une étoile mais comme un disque lumineux qui tournait autour de leur monde. [...]
[...] Il convient donc de distinguer la Nature naturante (Dieu et ses attributs) et la Nature naturée (les choses singulières causées pas Dieu), Dieu n'étant rien d'autre que l'organisation nécessaire de la Nature. Autrement dit, le monde matériel comme la pensée consciente dépendent d'une réalité ultime dans laquelle elles existent, et qui est Dieu. Le culte divin revient ainsi à connaître la nécessité naturelle, non à adorer un Dieu personnifié comme le propose le théisme. En outre, et c'est un point qu'il importe de noter, les choses de la Nature n'ont pas été, dans cette conception, créées par Dieu pour les Hommes mais ceux-ci sont une partie de la Nature entière. [...]
[...] La Nature étant en même temps esprit et matière, elle est tout pour les disciples qui ne peuvent rien imaginer au-delà. Il n'y a point ici la notion chrétienne d'un Dieu sauveur ayant créé librement les êtres et leur ayant communiqué, par amour, une parcelle de sa liberté ; puis, à la suite de la chute originelle que ce libre-arbitre explique, ayant entrepris luimême la réhabilitation de sa Créature laquelle se trouve, ainsi, lui devoir tout, et son être et son salut. [...]
[...] La ferveur religieuse se recentre donc vers l'intérieur et l'Homme peut enfin avoir foi en lui-même, en la vie, en toute chose. L'immanence, dont le panthéisme est une expression, apparaît donc comme une confiance, un espoir placé en nous-mêmes, et non plus remis à ce même Dieu qui vit en nous. La religion est dite faite pour aider l'Homme à vivre intensément le monde présent ; la confiance en notre monde peut peut-être l'y aider. [...]
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