L'existence de l'homme semble à chaque instant être marquée par une attente. Sa situation le laisse toujours insatisfait, il ne peut alors que reconnaître combien le manque caractérise sa manière d'être au monde. En effet, même si nous avons souvent tendance à nous pencher sur notre passé (le regret et la nostalgie nous amènent à idéaliser ce qui a été), c'est surtout vers l'avenir que nos regards se tournent : nous espérons rencontrer enfin cet objet qui nous manque et déterminons nos actions d'après ce but (on remarque que c'est souvent en fonction d'un passé qui n'est plus que nous cherchons à inventer un avenir qui n'est pas encore). Ce manque qui nous amène à regarder vers l'avenir n'est autre que le désir. Cependant, parce que ce désir n'est que manque, insatisfaction, il serait logique que nous le fuyions, que nous cherchions à tout prix à le supprimer, soit en détruisant sa source, son origine, soit en le satisfaisant. Or, contrairement à cela, il semblerait que nous nous plaisions parfois à le cultiver. Il y a en effet dans le désir quelque chose d'excitant et de fascinant : une puissance qui semble mettre notre exigence en mouvement. Le romantisme a excellé dans la peinture de ce dynamisme du désir.
L'amour impossible est en effet un lieu commun du romantisme : d'après lui, ce serait précisément l'impossibilité d'aimer un être qui le rendrait aimable. Ainsi, il faut bien reconnaître que le héros romantique n'aime pas véritablement l'être vers qui se porte son désir, il aime avant tout le désir lui-même, au point de vouloir que ce dernier ne cesse jamais, qu'il ne disparaisse pas dans la satisfaction. Tout se passe comme si ce qui plaisait au romantique était avant tout le désir de l'impossible. Mais ne sommes-nous pas, à notre manière, de grands romantiques ? Nous aussi, avons souvent tendance à nous complaire dans le désir de l'impossible. Peut-être même nos désirs les plus prosaïques ne font-ils que masquer un autre désir, plus profond et peut-être insatiable ? Ainsi, nous pouvons nous demander si l'on peut désirer autre chose que l'impossible (...)
[...] Ainsi, il faut bien reconnaître que le héros romantique n'aime pas véritablement lʼêtre vers qui se porte son désir, il aime avant tout le désir lui-même, au point de vouloir que ce dernier ne cesse jamais, qu'il ne disparaisse pas dans la satisfaction. Tout se passe comme si ce qui plaisait au romantique était avant tout le désir de l'impossible. Mais ne sommes-nous pas, à notre manière, de grands romantiques? Nous aussi, avons souvent tendance à nous complaire dans le désir de l'impossible. Peut-être même nos désirs les plus prosaïques ne font-ils que masquer un autre désir, plus profond et peut-être insatiable? Ainsi, nous pouvons nous demander si l'on peut désirer autre chose que l'impossible. ! [...]
[...] Un tel désir ne pourrait qu'être source de malheur. Mais d'un autre coté, désirer une chose dont la possession semble possible parait également paradoxal : pour que je reconnaisse la possession de cet objet comme possible, ne faut-il pas que je sois déjà proche d'atteindre mon but et par conséquent que j'aie dépassé le simple stade du désir? Le problème réside dans le fait que l'on ne peut jamais être certain de l'impossibilité absolue de ses désirs. Il s'agit avant tout de nous interroger sur l'ambiguïté du désir : soit le désir est synonyme de passivité (et n'implique en rien la tentative de réalisation) dès lors, la possession de l'objet restera définitivement impossible, soit le désir est déjà tentative de satisfaction. [...]
[...] On peut alors considérer que ce désir que l'on veut éternel, et qui est donc désir de l'impossible n'est sans doute qu'un simulacre de désir. A cette manière de cultiver le désir, de vouloir le maintenir éternellement dans le rêve de l'impossible, s'oppose l'attitude du sage chez qui le désir est toujours en même temps force de réalisation et ouvre donc sur l'action. ! Le désir de l'inactuel ouvre sur l'actualisation, c'est-à-dire l'action; le désir de l'impossible est enfermement dans la passion. [...]
[...] En effet, si l'on désire un objet, c'est souvent parce que ce dernier est valorisé par le milieu auquel on appartient. Il y a donc dans le désir une influence sociale : je désire ce que mon milieu socioculturel et mon éducation me font désirer. Mon désire semble donc m'échapper : si la pulsion vient bien de moi, la manière dont elle s'exprime dépend de la société. Bien souvent, un objet est désiré (et donc valorisé) parce que l'on sait qu'il est convoité par d'autres. [...]
[...] L'intériorisation des interdits, des normes et des valeurs amène donc l'individu à renoncer à certains désirs, à considérer leur satisfaction comme impossible. Freud reconnaît la nécessité de prendre en compte l'impossibilité de la satisfaction du désir pour comprendre le psychisme humain. Ainsi, il nomme surmoi l'ensemble des interdits qui pèsent inconsciemment sur notre psychisme. C'est ce surmoi qui est l'origine du refoulement de certains désirs - refoulement lui-même inconscient. Ainsi, Freud recourt-il très souvent au complexe d'Oedipe pour expliquer certains symptômes; ce complexe nous met en présence d'un désir dont la satisfaction est interdite et condamnée par toute société mais qui joue cependant un rôle essentiel dans la structuration de l'inconscient. [...]
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