Le désir est le nom que l'homme donne au sentiment de manque qui l'habite et qui lui fait regretter de ne pas posséder ? ou de ne pas être ?ce qui est l'objet de son désir. En cela, le désir est cause de souffrance en l'homme et c'est la raison pour laquelle la tradition le condamne sans appel (...)
[...] [III- Le désir comme contenu même de l'exigence morale] 1. Une erreur à ne pas commettre : confondre le désir et les passions Il nous faut en effet distinguer différentes formes d'affects. Spinoza, dans son ouvrage l'Ethique, nous permet de les différencier en recourant au critère de la puissance du sentiment d'existence : en cela, certains affects développeraient en nous un sentiment d'amoindrissement de notre être (la honte, la tristesse, l'échec, la jalousie, la mélancolie, l'angoisse, la dépression, l'envie, l'avarice ce sont des passions négatives ; alors que d'autres nous donnent un sentiment de développement de notre être (amour, fierté, réussite, joie, bonheur, générosité, créativité artistique, intellectuelle ce sont des passions dites positives Ce qui distingue fondamentalement ces deux types d'affects est la concordance ou non qu'ils entretiennent avec notre nature : certains affects nous correspondent fondamentalement, ils nous permettent d'atteindre une certaine forme du Bien, et c'est la raison pour laquelle il nous est important de les satisfaire. [...]
[...] L'homme peut en effet désirer tout et n'importe quoi. Le besoin relèverait donc de ce qui nous est nécessaire pour assurer notre survie tandis que le désir orienterait l'homme vers la sphère de l'inutile et du superflu Réelle difficulté cependant à clairement distinguer ce qui est de l'ordre du besoin et ce qui est de l'ordre du désir Cependant, le rapport qui unit besoin et désir est loin d'être aussi évident. S'il est vrai que le besoin n'a affaire qu'au nécessaire, il est vrai aussi que le caractère du désir prend très souvent chez l'homme cette forme de nécessité qui ne devrait, selon notre analyse, ne relever que du besoin. [...]
[...] En second lieu, les plaisirs naturels et non nécessaires (exemples de la gourmandise ou de l'esthétisme). Enfin, les plaisirs non naturels et non nécessaires (exemples du social, des honneurs, de la richesse, de la gloire ou de la puissance). Les désirs naturels et nécessaires se doivent toujours d'être satisfaits ; les plaisirs naturels et non nécessaires (exemple de la sexualité) ne doivent être satisfaits qu'exceptionnellement. L'épicurisme présente donc une économie subtile du plaisir et de la douleur, mais qui n'a d'autre but que d‘aboutir à une doctrine de l'autarcie, c'est-à-dire se suffire à soi- même. [...]
[...] Dès lors se comprend aussi l'illusion qui peut être propre au désir : l'homme imagine en effet ce qui peut être cause de son bonheur. L'objet du manque a donc pour origine le fantasme et non la raison. L'imagination peut donc s'égarer et présenter à l'homme son bonheur sous forme de pure chimère. Loin de le conduire au bonheur, le désir serait alors bien plutôt cause de son malheur et en cela le désir peut se voir condamner. L'une des critiques les plus radicales du désir se trouve paradoxalement dans la philosophie d'Epicure, connu pourtant pour son hédonisme grec hédoné qui signifie plaisirs –c'est-à-dire pour sa recherche du plaisir et le souci d'éviter la souffrance. [...]
[...] L'éthique du désir rejette jusqu'à l'excuse d'avoir eu à faire son devoir car le devoir moral, si pénible puisse-t-il sembler, peut être invoqué, voire exercer, à la façon d'un divertissement sens pascalien du terme rapport à la règle de son désir. L'expérience analytique permet d'établir, par son autorité propre, que l'éthique du désir pèse plus lourd que n'importe quelles autres morales : les hommes s'en veulent plus –même s'ils parviennent à se le voiler –d'avoir trahi leur désir que d'avoir trahi la loi morale ; rien ne résiste au poids de cette expérience du désir. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture