Nous sommes des hommes c'est-à-dire les êtres les plus évolués. Nous nous distinguons des autres espèces vivantes par notre conscience, notre pensée. Or cette pensée s'incarne dans un corps auquel elle est étroitement unie. Et cette union, cette interaction de l'âme et du corps fait de nous des êtres sensibles qui éprouvent des sentiments, des désirs. Or, le désir est un mouvement vers quelque chose que l'on imagine source de satisfaction. Nous ne possédons pas ce que nous désirons et nous avons conscience de ce qui nous manque, nous nous sentons pauvre. Il est difficile de satisfaire nos désirs car à peine satisfaits, ils renaissent ou laissent la place à d'autres désirs. Nous souffrons du manque, de la pauvreté, un malaise profond nous envahit. Nous nous sentons misérables et nous sommes malheureux. Le désir est-il la misère de l'homme ? Faut-il en rester à cette vision tragique qui fait de nous des êtres incomplets, déchirés ? Le désir est-il vraiment manque, défectuosité, blessure, rôle essentiel ? Le désir n'est-il pas au contraire une force, une plénitude ? En effet, il est une énergie qui nous pousse à nous dépasser. Nous nous accomplissons en produisant, en créant et en donnant un sens à notre existence. Le désir ne devient-il pas alors une source de satisfaction, de joie ? Mais n'y a-t-il pas une ambiguïté du désir qui expliquerait qu'il puisse à la fois être la cause du malheur, de la misère de l'homme et de sa puissance, de son bonheur ?
[...] N'est-ce pas parce que le désir est manque qu'il est la misère de l'homme ? Le désir est détresse L'homme qui désire est pauvre et souffre de son manque de quelque chose qui lui parait essentiel. Le désir est la misère de l'homme parce qu'il est la marque de son manque, de sa pauvreté. Il est une faiblesse. L'homme qui désire est malheureux. Le désir est détresse, situation poignante parce qu'il représente le passage étroit de celui qui vise quelque chose qu'il ne parvient pas à atteindre. [...]
[...] Il n'est pas non plus une source de joie quand nous nous épuisons dans la vaine recherche de biens illusoires. Le désir est un terme ambigu. Il nous fait effectivement souffrir et devient une faiblesse quand nous sommes dévorés par l'ambition, la soif d'argent, d'honneur. Par contre, quand il aiguillonne l'âme pour qu'elle puisse accéder au Bien, il devient source de joie. L'homme est à la fois un être de raison et de désir. [...]
[...] Platon a montré que le désir est manque dans son dialogue Le Banquet. Eros est l'incomplétude. C'est en particulier le mythe de la naissance d'Eros qui nous mène au contre de notre problème. Ce mythe est exemplaire, car c'est Pénia, la pauvreté. Le manque qui fut, la mère d'Eros. La mère du désir, Pénia est l'indigence. C'est une mendiante. Le désir est donc issu de la pauvreté, du manque. Pénia n'avait pas été invité au festin des Dieux. Aussi, se tenait-elle en mendiante sur le seuil espérant attraper quelques reliefs du régal. [...]
[...] Le désir n'est alors pas le malheur de l'homme. Ce délire n'est pas démesure, mais amour de la sagesse. Cette forme de délire est supérieure à toutes les autres et infiniment féconde. Ainsi, l'amour élève l'âme jusqu'à la contemplation du Beau absolu, et lui procure ainsi une immense joie. Un tel désir n'est pas une maladie de l'âme, mais une force qui parvient à unifier l'existence. Socrate animé du désir du Bien, de la vérité, a consacré toute sa vie à cette recherche. [...]
[...] UIl est fondamentalement sentiment d'abandon, solitude, impuissance, état de détresse et épreuve triste. Mais renvoie-t-il vraiment à une situation tragique de l'homme ? Signifie-t-il seulement que l'âme se vide comme un tonneau percé ? Ne peut- il pas être une énergie, une force qui en nous permettant de produire, de créer, provoque en nous un épanouissement ? II- Le désir n'est pas la misère de l'homme Le désir est l'essence de l'homme L'homme est un être de désir. On peut voir dans cette notion de désir l'essence de l'homme. [...]
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