On associe généralement les notions de science et de démonstration. Mais le fait qu'une démonstration circulaire soit logiquement valide bien qu'elle ne prouve rien, car sa conclusion figure déjà sans ses prémisses, semble indiquer que ces deux notions ne sont pas forcément synonymes. N'y a-t-il donc de démonstration que scientifique ? La question porte sur la nature et la valeur de nos démonstrations. Le problème est de savoir si elles sont toutes scientifiques, parce qu'elles donnent à la science ses règles, ou si cette dernière ne se réduit pas aux premières et qui n'en sont qu'un moment. Toute démonstration est-elle scientifique car elle est la méthode des sciences, ou celles-ci en diffèrent-elles parce qu'il ne suffit pas de démontrer rationnellement un théorème pour qu'il soit scientifiquement prouvé ? (...)
[...] Cette différence permet à Leibniz d'étendre la notion de démonstration hors du pré carré des mathématiques où les anciens l'avaient enclos. Démontrer consiste toujours à établir une connexion nécessaire. Mais une démonstration peut se fonder soit sur le principe de non-contradiction, soit sur celui du meilleur. Démontrer consiste dans le premier cas à ramener la proposition à l'identique en montrant que le concept du prédicat est déjà logiquement contenu dans celui du sujet, si bien que leur séparation implique contradiction. [...]
[...] Ces disciplines peuvent devenir des sciences démonstratives, fournissant à l'appui de leurs thèses des preuves a priori, universelles et nécessaires, fondées sur des idées claires et distinctes. Cela vaut aussi pour l'histoire, sinon en fait, du moins en droit, car le calcul du détail de la preuve demanderait un temps infini incompatible avec la finitude de l'existence humaine avoue Leibniz. Son analyse autorise finalement à dire que si toute démonstration est scientifique, toute science est aussi démonstrative. L'évidence des premiers principes peut en effet se démontrer mathématiquement et l'on ne doit rien admettre sans preuve ni nécessité. [...]
[...] Il existe donc des démonstrations en mathématiques. Il n'en existe qu'une en morale, mais elle fait toute notre dignité : c'est celle, sublime, de la liberté humaine par la loi du devoir. Conclusion On peut donc conclure de ce parcours qu'il n'y a effectivement de démonstration que scientifique, si l'on prend soin de distinguer cette notion de celles de preuve, de déduction, ou de raisonnement avec lesquelles on la confond habituellement. La démonstration est une espèce particulière de preuve, purement nécessaire. [...]
[...] Cette loi nous commande de traiter l'humanité comme une fin en soi. Cette exigence ne doit souffrir d'aucune exception et n'est soumise à aucune condition : elle est absolument inconditionnée. Elle s'impose de façon universelle et nécessaire. C'est un impératif catégorique. Or ce principe d'action ne peut se déduire d'aucun autre, nous dit Kant. La loi morale ne fait pas entendre sa voix à l'issue d'un long raisonnement et n'est pas non plus le fruit de l'éducation, car elle ne pourrait dans les deux cas s'adresser naturellement à tous les hommes et perdrait son universalité. [...]
[...] La réponse qu'apporte la théorie aristotélicienne du syllogisme est donc sans ambiguïté : toute démonstration est scientifique, car une démonstration est un discours nécessaire, universel et vrai. La démonstration est le privilège de la science. Mais cela ne signifie pas que tout raisonnement soit scientifique, ni que la science se limite à la démonstration. Il ne faut pas identifier ici les notions de science et de démonstration. La démonstration n'est qu'une région du vaste domaine des sciences qu'Aristote divise en trois. [...]
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